Fesque de Nelio durant l'édition 2022

Les Nouveaux Ateliers à Port-de-Bouc

Pari sur les bombes

 

À la fin du mois, pour quelques jours et pour la quatrième fois, Port-de-Bouc s’habille d’échafaudages et se parfume des particules doucereuses des peintures en bombe, grâce à son fameux festival Les Nouveaux Ateliers. À la direction artistique, le collectif de graffitistes Lartmada va une fois de plus organiser neuf ravalements de façade par neuf artistes avéré·es, sous (la pluie ? et) les yeux des habitant·es, amateur·ices de fresques et de promenades urbaines.

 

 

Dans ce bastion communiste, l’un des rares de la région, est né ce festival qui gonfle d’édition en édition les murs de couleurs. Cette année, alors qu’on compte déjà trente fresques à travers la ville, le parti pris artistique se revendique plus radical, avec des artistes plus « post-graffiti », donc qui viennent plus du tag — globalement concentré autour de la signature, du lettrage et de la typographie — que du policé et muséifié « street art ». Au sein de ce qu’on appelle, dans un fourre-tout toujours discutable, « l’art urbain », les critiques sont désormais formel·les : les courants post-graffiti et post-street art sont nés. On remarquera la tendance à revendiquer un affranchissement des vieilles conceptions (et néanmoins inventions) par l’apposition du préfixe de l’après, le « post » qui convoque un présent plutôt contestataire d’un passé déjà controversé (le punk, le club, le graff…), à la mode dans les niches. Donc, confinés aux toiles des galeries, ou sortis des friches pour passer aux châteaux (comme au Château de Forbin, en 2020), les vandales désormais érigé·es artistes ne bravent plus les lois étatiques, mais celles du marché de l’art (merci du cadeau). C’est par exemple le cas de la suisse Rosy One, graffeuse au style sourcé hip-hop ; elle s’est fourbie aux tunnels souterrains métropolitains avant de passer un moment entre des murs moins funs, barbelés et à l’ombre… Sortie de là et de ses multiples blazes, elle signera de couleurs néon et d’arrondis bling bling ses typos chargées, mais très lisibles, sur les murs de l’école Anatole France. Parmi les stars en bombe pour Port-de-Bouc, on compte aussi Ana Langehelft, alias Lahe178, de Séville, aux portraits expressifs et aux traits oniriques ; ou le français Gris1, aux références caractéristiques entre pop et indus, agencées entre elles en des patchworks bien nets et léchés. La médiathèque Boris Vian sera quant à elle recouverte par les douces abstractions de Bims, aux compositions plus organiques ; tandis que le marseillais Tchader ira à la Maison des Projets poser ses codes rétro-gaming qui jouent sur les illusions des perspectives, avec des immersions dans les débuts de l’ère informatique…
Pour en revenir à l’idée de « street art », il faut dire que ce qu’on traduit littéralement par « l’art de la rue » ne s’arrête pas au collage ou à la peinture murale. Chez les Nouveaux Ateliers non plus, puisqu’en plus de pouvoir observer et identifier tranquillement les désormais post-graffeur·euses en train de post-graffer, le programme du festival se compose aussi d’un spectacle d’une activité non moins incriminée : du parkour. Toutefois, il compte aussi de légèrement moins frondeurs concerts ou pièces de danses, comme le spectacle de la Cie Regard d’Orphée depuis le monde des docks et des chantiers navals ; ainsi qu’une originale « rando-croquis » à partir des fresques, ou une tapageuse et étincelante déambulation en fanfare.

 

MD

 

Les Nouveaux Ateliers, du 29/05 au 3/06 à Port-de-Bouc (13).
Rens. : 04 42 40 04 04 / festival-lna.fr

Toute la programmation des Nouveaux Ateliers ici