Les Oranges, deuxième partie (l’indépendance et la reconstruction) au Théâtre de Lenche

Les Oranges, deuxième partie (l’indépendance et la reconstruction) au Théâtre de Lenche

100 % pur jus

De son balcon, un homme regarde vivre son quartier et nous parle de son pays. Voici Les Oranges, petites chroniques et grande histoire de l’Algérie, signées Aziz Chouaki.

les-oranges.jpgAziz Chouaki aime bien le changement, au moins dans l’écriture ; pas le temps de s’ennuyer ni de se poser dans un registre. D’une narration il passe à un dialogue, enchaîne sur un récit, nous livre une anecdote et ce n’est pas fini. Le ton et les émotions varient en permanence : moqueur et touchant quand il incarne le « petit peuple », dramatique à l’évocation des différentes guerres, cynique à propos des militaires, poétique et rêveur quand il parle d’Alger. L’auteur passe de l’un à l’autre comme les événements lui viennent à l’esprit, mais à la manière d’un jazzman où l’improvisation a finalement un sens.
Devoir de mémoire dans le jargon, cours d’histoire pour les érudits, Les Oranges sont surtouts des récits de vie et d’expériences humaines. La pièce est pleine d’autodérision, pleine du regard expert et tendre des Algériens sur eux-mêmes, avec une distance voulue qui ôte à la pièce toute vocation didactique. Bien au contraire, le dispositif minimaliste et l’art de la suggestion choisis par le metteur en scène sont au service de notre imaginaire, permettant à chacun une meilleure appréhension des personnages, et par là même une lecture apaisée de l’Histoire.
Estrade et rochers en carton-pâte pour le décor, bout de tissu pour le costume, parapluie et chapeau pour les accessoires : la simplicité de la mise en scène n’a d’égal que la densité et la richesse du texte. Pour le servir, Belkacem Tir utilise parfaitement cette technique d’écriture très changeante. Très mobile, le comédien investit l’espace avec moult variations de rythmes, devient conteur, danseur, poète, bouffon, mêle les langues et s’empare de tous les personnages à bras le corps. Il est tout le peuple algérien. Il est seul et multiple à la fois.
A Alger, l’homme est toujours à son balcon et poursuit son récit. Oyez, oyez brave gens, courrez tous l’écouter !

Yves Bouyx

Les Oranges, deuxième partie (l’indépendance et la reconstruction) : jusqu’au 11/04 au Théâtre de Lenche. Rens. 04 91 91 52 22 / www.theatredelenche.info