ENFERMES DEHORS- (France - 1h28) de et avec Albert Dupontel, avec Nicolas Marie, Claude Perron...

ENFERMES DEHORS- (France – 1h28) de et avec Albert Dupontel, avec Nicolas Marie, Claude Perron…

Après ses passages à la Classe de Fabrice, un one-man-show à succès — sans Rire et Chanson — et une dizaine de participations dans des longs-métrage français, Albert Dupontel est définitivement installé dans le paysage audiovisuel. Enragé engagé, névrotique timide, fidèle et généreux… (lire la suite)

Y a-t-il un flic pour sauver la reine du hard ?

Après ses passages à la Classe de Fabrice, un one-man-show à succès — sans Rire et Chanson — et une dizaine de participations dans des longs-métrage français, Albert Dupontel est définitivement installé dans le paysage audiovisuel. Enragé engagé, névrotique timide, fidèle et généreux, le performeur a, comme ses personnages, un profil qui se dessine au fil de ces quinze années et prend place dans une case particulière : le barré gentil qui sommeille au fond de chacun de nous. C’est également le cas de son « œuvre ». Synthèse de son travail sur scène, Bernie fut l’avènement d’un humour trash, absurde mais humain : l’histoire d’un décalé, rebut de la société, recherchant ses parents à l’aide d’une pelle. Tome II : Dupontel est Darius, Le Créateur accidentel de pièces de théâtre. Pour que l’inspiration vienne, il faut qu’un proche meure : très vite, il va devoir accélérer le processus. Fin de la trilogie cette semaine avec Enfermés dehors, film à ranger au rayon — presque vide — « cartoon social ». Frère de fortune de Bernie, le clochard Dupontel se retrouve en possession d’un uniforme de flic dont il entend bien se servir pour répondre à quelques préoccupations : manger, rendre justice et séduire le mannequin des publicités pornos. En fait, non, il aurait préféré rendre l’uniforme ou bien donner un coup de main. « Non ? Bon ben alors… j’le garde ? bon, euh… j’y vais ! » Entre le Chaplin des Temps modernes, le Coluche de « Gérard !!! » et Jackass, Dupontel envoie une satire pas bien fine de notre société, mais dans un univers amical. Comme au théâtre, les lieux sont restreints et vite familiers, tout comme les personnages, jamais vraiment méchants, interprétés par les acteurs des autres opus. On y retrouve également Noir Désir au son : c’est le confort familial à la Derrick. Cet aspect « film français du dimanche soir », rassurant, également dû à la clownerie permanente, empêche certainement d’être embarqué dans l’autre propos du film : définitivement politique et social. Ainsi, même s’il est plus distrayant qu’efficacement de gauche, Enfermés dehors boucle le parcours ouvert avec Bernie, en dénonçant les vices affairistes et, surtout, en manifestant un espoir nouveau pour la lutte sociale et l’amour. Dix ans après le cultissime film taxé d’« extrême violence gratuite », Dupontel retombe sur ses pattes et ne cache pas son évolution normale de post-ado, mal dans sa peau, devenu papa il y a quelques mois. Loin des faiseurs de films professionnels, Monsieur Albert garde le cap de l’intégrité et de la démarche personnelle : autoproduit grâce à ses cachets d’acteurs, filmé en famille, Enfermés dehors est une pièce humaine qui préfère définitivement la spontanéité jouisseuse du « J’vais tout péter ! » à n’importe quel bon goût subversif. Ce troisième long-métrage accompagne un peu plus loin Le Créateur dans sa vision décalée — certains diront « tarée ». Attachant parce que sincère, le monsieur continue son chemin modeste et besogneux, rassemblant de plus en plus d’inconditionnels qui, en attendant le prochain, vont user le DVD de celui-ci, comme ils l’ont fait pour le précédent.

Emmanuel Germond