Ça planche n° 203

Ça planche n° 203

Ismène, par la Cie Du zieu dans les bleus
Lulu, par le Cartoun Sardines Théâtre
Maître Puntila et son valet Matti, de Bertolt Brecht par le Teatro Malandro
Rue libre ! : journée nationale des Arts de la rue

Ismène
_Par la Cie Du zieu dans les bleus
Le projet est ambitieux. Ismène, premier épisode de la trilogie Les Suppliantes, s’inscrit dans un travail de recherche formelle sur la tragédie qui convoque ici Eschyle et Sophocle, avant de faire appel au contemporain Howard Barker, et pendant que s’écrira la tragédie manquante, ultime étape du cycle. Pour la compagnie Du zieu dans les bleus, la perspective n’est pourtant pas historique ou « archéologique », elle répond à une volonté d’expérimentation contemporaine que l’on retrouve dans un séduisant mais perfectible esthétisme formel : bel objet qu’Ismène, qui joue sur le dépouillement du plateau, les lumières, l’image ou l’amplification… Reste le texte, matériau incontournable de la tragédie, qui, même dépoussiéré, vient assez souvent « plomber » la représentation, imprimant un rythme plutôt languissant. Désarçonnante aussi, surtout dans un projet centré sur des figures féminines tragiques, est la grande discrétion du personnage d’Ismène. Il y a encore du pain sur les planches, rien de plus normal finalement pour un tel travail de recherche…
_Jusqu’au 27 au Théâtre Massalia

Lulu
_Par le Cartoun Sardines Théâtre
Berlin, 1920. Lulu est danseuse de revue. Belle, séduisante et provocante, elle attire tous les regards, mais cache aussi en elle la tentation du pire et le poison. Au milieu d’un monde masculin et bourgeois, Lulu est une femme libre et riche qui révèle tous les vices des hommes qui veulent, tour à tour, la posséder — au sens propre comme au figuré. De Berlin à Paris en passant par Londres, la petite troupe bohème du spectacle, prise dans une fuite en avant, ivre de désir, assoiffée de vertige, d’argent, de fête et de beauté, se laissera guider par ses pulsions et par la tentation du danger… Après la version théâtralisée de Faust, film muet de F.W Murnau, Patrick Ponce et Dominique Sicilia flirtent de nouveau avec le cinéma expressionniste allemand. En mettant en scène un rapport permanent entre des comédiens vivants et l’image sur pellicule d’acteurs morts, Lulu raconte certes la même histoire que Pabst, mais révèle ce qui y est enfoui. Et donne à voir le texte qu’il ne dit pas, en montrant et laissant entendre l’indicible.
_Jusqu’au 27 à la Minoterie

Maître Puntila et son valet Matti
_De Bertolt Brecht par le Teatro Malandro
Maître Puntila, en « bon » propriétaire terrien, administre son domaine et ses (petites) gens via une inconstance qui force le respect : lorsqu’il est ivre, c’est le plus généreux des hommes et lorsqu’il est sobre, c’est le plus cruel de tous ! Son valet, Matti, l’accompagne dans sa cyclothymie, résistant tant à la cruauté qu’aux propositions de fraternisation de son maître — que ce dernier aurait tôt fait de lui reprocher une fois l’ivresse envolée… Après El Don Juan, Omar Porras s’empare de ce texte fondamental de Brecht qui visite lui aussi la relation Maître-Valet, couple ô combien théâtral, fondé sur un rapport de force toujours dynamique et ouvert à tous les retournements et autres fous-rires. Au croisement de la tradition et de la modernité, sur les traces de la commedia dell’arte, Porras privilégie la dynamique entre les deux personnages centraux qui incarnent avec une suprême dérision les archétypes d’un monde à la fois tragique et drôle, faisant de ce texte le miroir grinçant de notre époque.
_Jusqu’au 27 au Gymnase

Rue libre !
_Journée nationale des Arts de la rue
Nés il y a plus de 2500 ans, les arts de la rue sont aujourd’hui au cœur d’une triple ambition pour le spectacle vivant : démocratiser son accès, replacer les artistes au cœur de la cité et transformer la perception de l’art en favorisant la transdisciplinarité. Afin de réaffirmer ces objectifs, les professionnels du secteur organisent un grand moment festif ce samedi dans toute la France. La région PACA, qui constitue avec ses vingt-sept membres (dont deux des neuf centres nationaux, Lieux Publics et le Citron Jaune d’Ilotopie) et la prochaine ouverture de la Cité des arts de la rue un foyer créatif quasi inégalé en France, sera le théâtre de multiples manifestations protéiformes, parmi lesquelles l’invasion des T.E.R. par une troupe éphémère de joyeux hurluberlus. A cette occasion, le dispositif R.I.R. Rue (Réseau inter-régional Rue), animé par Karwan, proposera également une tournée régionale du spectacle Misérables ! par la compagnie Annibal et ses éléphants. Une farce cruelle, mise en abîme de l’œuvre de Victor Hugo où des saltimbanques se retrouvent à vivre la pièce quand ils pensaient seulement la jouer.
_Le 27 partout en France

CC/GJ/HS