Rien comme quelque chose se produit quelque part dans divers lieux du département

Rien comme quelque chose se produit quelque part dans divers lieux du département

expo-Clement-Bagot.jpg

Vin sur vin

Loin de la ville et des galeries d’art, l’association Voyons Voir propose chaque été une balade à travers les vignobles et l’art contemporain. L’exposition Rien comme quelque chose se produit quelque part se décline sur trois sites de rêve, dans la campagne aixoise.

La somme des représentations négatives qui collent à la peau des lieux d’art contemporains reste une entrave majeure pour que le grand public passe le pas. Sortir de ces lieux stigmatisés favorise une ouverture vers un public plus large et quand on réunit deux mondes – celui du vin et celui de l’art – comme le fait Voyons Voir, les résultats sont encore plus probants. Bernadette Clos Goudard et son équipe appliquent un échange de bons procédés entre les exploitants des domaines viticoles et les artistes. Les uns valorisent le territoire et apportent leurs regards sur les activités et les sites, les autres offrent leur contribution à la création contemporaine. Finalement, chacun y trouve son compte, surtout le public…
La programmation de cette sixième édition réunit huit artistes de notre région et d’ailleurs qui, à l’issue d’une résidence, nous restituent le fruit de leurs recherches et de leur vision du site investi. Au Jardin des Cinq Sens, Denis Brun renoue avec « la pensée magique » de son enfance et réalise une installation entre rêve et réalité. Pour Sandra Lorenzi, la manifestation est l’occasion d’utiliser le vin comme une matière à part entière. Au Château Grand Boise, elle érige une sculpture à la gloire de l’activité du domaine. Fontaine ou monument solennel et phallique de tôle souillée par on ne sait quelles bacchanales, sa sculpture monolithique rivalise avec le paysage. Jérémie Delhome transpose pour sa part les questions de forme et de fond inhérentes à sa peinture en réalisant une installation sur les murs en pierres sèches du domaine. Emilie Perrotto choisit quant à elle de se faire complice du spectateur en lui offrant un abri où il peut voir sans être vu…
A Puyloubier, Guillaume Gattier revisite la légende du saint étêté qui a donné son nom au domaine et lui offre ses propres traits. Après un parcours presque processionnaire à travers les vignes, Gattier nous amène jusqu’au saint des saints : une cabane de bois rudimentaire protège la tête que Saint Ser aurait perdue, marquée des stigmates provoqués par les divers obstacles qu’elle rencontra dans sa chute du cinquième étage d’un immeuble marseillais… Comme dans ses dessins, Clément Bagot tisse à travers les restanques un réseau de lignes et de couleurs qui jouent avec la géométrie du site. Enfin, Pierre Labat plante une sculpture minimaliste dont la présence à la fois simple et forte guide le regard du spectateur à travers le paysage. En déambulant, on se dit que la nature et l’art se côtoient et se répondent, et la phrase de Brancusi nous revient soudain en tête : « Ce qui a vraiment un sens dans l’art, c’est la joie. Vous n’avez pas besoin de comprendre. Ce que vous voyez vous rend heureux ? Tout est là. »

Texte : Céline Ghisleri
Photo : L’e?talon de Cle?ment Bagot

Rien comme quelque chose se produit quelque part : jusqu’au 31/10 au Domaine de Saint Ser (Route Cézanne – RD17, Puyloubier), au Château Grand Boise (1536 Chemin de Grisole, Trets) et Jardin des Cinq Sens et des Formes Premières (220 Chemin de Repentance à la forêt, Saint Marc Jaumegarde).
Rens. www.voyonsvoir.org