Fatima de Philippe Faucon

Reprise de la Quinzaine des Réalisateurs de Cannes

Cannes bis

 

Comme chaque année, l’Alhambra renouvelle son partenariat avec la Quinzaine des Réalisateurs du Festival de Cannes, et propose une poignée de films sélectionnés au sein de la prestigieuse section parallèle, dont 2015 restera comme un excellent cru.

 

Le bouillonnement cinématographique cannois aura, à l’instar des années précédentes, autant excité que découragé. C’est l’effet Cannes : les heureux propriétaires du Graal (ici, le badge) se ruent d’une salle à l’autre, consentant à la dogmatique attente (parfois deux heures) pour avoir la primeur d’un film qu’ils n’iraient peut-être pas voir en salles. Las, l’estampillé plus grand festival du monde — on parlera plus volontiers de marché du film — déroute encore par ses choix énigmatiques, heureusement concentrés au sein de la compétition officielle. Car l’intérêt patent de la manifestation est à dénicher au cœur des sections parallèles, à commencer par « Un certain regard » ou la « Quinzaine des Réalisateurs ». Cette dernière, menée tambour battant par un Edouard Waintrop cette année inspiré, a offert de beaux instants de cinéma, mêlant l’exigence au plaisir. Les absents de la Croisette ont cette année encore l’occasion de découvrir en avant-première, dans la cité phocéenne, une partie de la sélection : l’Alhambra, la sémillante salle estaquéenne, renouvelle en effet son partenariat avec la Quinzaine pour proposer un panorama de la section parallèle, avec la projection d’une poignée de films finement sélectionnés. A commencer par le triptyque qui restera pour nous le séisme cannois : les trois volets de la version moderne des Mille et une nuits distillés par le cinéaste portugais Miguel Gomes. Le réalisateur des excellents Ce cher mois d’août et Tabou réinvente les récits sans fin de Shéhérazade à l’aune de la situation politique et sociale d’un Portugal contemporain. Le résultat est brillant, drôle, foutraque, onirique, sensible et diablement intelligent. Soulignons par ailleurs que la structure en partie marseillaise Shellac, fréquemment évoquée dans ces colonnes, coproduit et distribue cette œuvre passionnante, s’imposant désormais tel un défricheur de premier plan au sein de l’industrie cinématographique hexagonale. Parmi les autres films présentés lors de cette reprise de la Quinzaine, citons le très bel opus de Philippe Faucon, Fatima, dont le ton juste et la richesse des personnages — une famille française d’origine maghrébine élevée par une mère célibataire — tordent le cou sans exagération à certains poncifs. Mais également le dernier film de Philippe Garrel, L’Ombre des femmes, exploration sentimentale toute en épure, Le Tout Nouveau Testament, grand retour enthousiasmant du cinéaste belge Jaco Van Dormael, ou Mustang du Turc Deniz Gamze Ergüven. Au final, une captivante programmation d’où se dégage encore un frisson d’air cannois.

Emmanuel Vigne

 

Reprise de la Quinzaine des Réalisateurs de Cannes : du 26/05 au 2/06 à l’Alhambra (2 rue du Cinéma, 16e).
Rens. : 04 91 03 84 66 / www.alhambracine.com

La programmation complète de la reprise de la Quinzaine des Réalisateurs ici