Nintendo Wii U

La sortie d’une nouvelle machine de salon de Nintendo est toujours un événement. Si la société possède une grande renommée, c’est en partie lié à ses licences maison (dont chaque itération lui assure le succès), mais aussi par la démocratisation de certaines technologies au profit du confort de jeu, au fil des décennies : la croix de direction (NES), le stick analogique (N64), la 3D relief (Virtual Boy et 3DS), le nomadisme (Game Boy) ou encore la reconnaissance de mouvements (Wii). Pour son dernier système en date, le géant japonais met en avant le concept de « gameplay asymétrique » : la console Wii U est livrée avec un contrôleur innovant, doté de dispositifs standards (deux sticks analogiques, une croix de direction et dix boutons), mais également d’un écran tactile de sept pouces, capable de gérer une image différente de celle affichée sur le téléviseur. Chaque joueur peut ainsi bénéficier de son propre point de vue de l’action, laissant préfigurer des situations intéressantes si les développeurs exploitent correctement la chose. Les initiés verront une amélioration de la connexion mise en place il y a quelques années entre GameCube et Game Boy Advance, preuve que le constructeur a de la suite dans les idées.
Si la grande force de cette tablette réside aussi dans le fait de disposer en permanence d’éléments pratiques (comme l’écran inférieur le permet, sur DS/3DS), elle autorise surtout le déport des images de la console, afin de continuer sa partie en mode nomade. Le scepticisme était de mise sur le papier, mais ce système de dérivation du flux vidéo, sans coupure ni latence, est bluffant de réactivité, et offre une convergence inédite entre jeu vidéo de salon et portable (une expérience tentée par Sony entre la PS3 et les PSP et PS Vita, mais à moindre échelle).
En pratique, la Wii U est à la hauteur des attentes technologiques placées en elle : puissance équivalente à celle de ses concurrentes HD actuelles (ce qui lui assurera de facto d’être désuète sur ce plan d’ici un an ou deux) et GamePad réactif (mais peu autonome), aux possibilités alléchantes. Il faudra juger des apports ludiques de son arrivée sur le marché : la voici dans ses premiers mois d’existence, une phase très délicate car les studios, en plus de n’avoir aucune certitude concernant les retombées économiques du développement sur un hardware naissant, n’ont généralement ni le temps, ni les moyens pour en tirer le meilleur dans des délais aussi brefs.
Le line-up, sans prise de risque, s’en ressent. On retrouve des blockbusters parus chez les concurrentes, dans des versions sensiblement inférieures mais tirant partie du GamePad d’une manière suffisamment efficace pour rendre son utilisation plus agréable qu’un simple joypad. En dehors d’un ZombiU audacieux (un survival-horror exigeant, misant sur les sensations plutôt que sur la technique), les licences Nintendo sont représentées par un New Super Mario Bros. U très efficace mais trop proche de sa mouture précédente, et un Nintendo Land exaltant à plusieurs, qui donne un aperçu du grand potentiel d’amusement permis par le gameplay asymétrique, qui semble — cette fois — plus qu’un gimmick.

 

SV