Geoffroy Mathieu – Dos à la mer à la Compagnie

Geoffroy Mathieu – Dos à la mer à la Compagnie

La Méditerranée selon Saint Mathieu

Avec un diaporama photographique et sonore comme pièce principale, Geoffroy Mathieu explore les possibles ressemblances entre des villes du pourtour méditerranéen (Beyrouth, Marseille, Alger, Valence, Tripoli, Gênes) dos à la mer, en cherchant ainsi à éviter les écueils de la représentation des ports.

Expo-dos-a-la-mer-Alger.jpgC’est le regard tourné vers l’intérieur des villes, et plus précisément sur des quartiers proches des centres et bien souvent en mutation, ces « zones de poésies anarchiques » selon les propres termes du photographe, que s’élabore la construction d’une réalité de son sujet. La ville comme espace architectural ne semble pouvoir ici être assimilée à une quantité de constructions (elle se transforme continuellement, comme le montrent les multiples photos de chantiers) ni à une réalité objective ; elle naît davantage de la perception des configurations spatiales. Elle se construit par « touches », « par des vues, des gestes, des visages, des objets », mais aussi par des couleurs, des textures. Si notre œil peut chercher à identifier la ville dans laquelle une image a été prise, cette quête perd de son sens au fur et à mesure que nous nous immergeons dans l’expérience visuelle et sonore proposée par le diaporama. L’œil focalise davantage son attention sur la façon dont la présence des habitants se manifeste à même les constructions urbaines, sur la manière dont la ville exprime les usages de ses habitants. Mathieu explore l’ambivalence des constructions : elles participent à la fois d’une simple fonction et d’une forme de vie, et possèdent également une autonomie quant à leurs niveaux de significations plastiques. En écho à son sujet, il explore le point de basculement du statut documentaire de l’image vers sa dimension poétique, les possibles passages entre une esthétique de la référence et de l’informativité et une esthétique de l’expression et de l’autonomie des formes visuelles. Ainsi, ces images se détachent d’une représentation stable de telle ou telle ville particulière pour manifester le paysage urbain méditerranéen saisi comme terrain d’intervention, comme rapport existentiel de l’homme à un milieu dans lequel l’artiste introduit un rythme singulier — d’un point de vue esthétique, social et politique.

Elodie Guida

Geoffroy Mathieu – Dos à la mer, jusqu’au 7/02 à la Compagnie (19 rue de Pressencé, 1er).
Rens. 04 91 90 04 26 / www.la-compagnie.org