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La compagnie Les Arts Felus propose cette semaine La maison accidentée. Une idée du cirque où le langage acrobatique devient une écriture… (lire la suite)

La compagnie Les Arts Felus propose cette semaine La maison accidentée. Une idée du cirque où le langage acrobatique devient une écriture

Le cirque nouveau avance, le cirque nouveau s’installe, laissant les animaux retourner à leurs occupations de toujours. Plus de foin, plus de manège, le cirque contemporain redéfinit l’interprète dans sa condition d’individu, s’affranchissant d’un grand écart entre le théâtre et l’acrobatie, redéfinissant les possibilité du corps dans des notions d’extrême et de non danger. Le clown triste a rangé sa malle, le cerceau de feu ne fait plus peur. On travaille avec des tapis de sol, des câbles de protection, la sécurité du travail devient un élément central de la pièce. L’acrobatie devient plasticienne, entremêlée avec la tragédie grecque. L’organisation du cirque contemporain part de l’idée du village. Une structure autoportée comme un gigantesque arc métallique sur lequel s’accrochent les agrès, les lumières, les échelles. On imagine le tout dans un grand champ, la foule avance vers l’objet hybride. A la manière du ciné-train d’Alexandre Medvedkin, le bus s’invite dans des coins reculés, pour quelques heures. Le chapiteau a disparu, tout se fait dans la légèreté du vide, dans la simplicité des agencements, avec l’autonomie d’une équipe réduite. Question : quelle est la différence entre un fildefériste et un funambule ? Le funambule tient un balancier, le fildefériste utilise son corps pour tenir une verticale. Au-delà de la piste de sable et des barreaux d’une cage, il existe un cirque qui trace un réseau, qui dialogue avec d’autres cirques dans cette possibilité de se réinventer et de survivre aux normes d’aujourd’hui, parce que le progrès est une petite mort (celle des arts traditionnels). Elle se tient en amazone, la voilà qui bascule sous son cheval… maintenant, elle se tient debout sur la croupe, puis sur la tête, un fouet électrise l’atmosphère : l’homme dirige, la femme virevolte, le cheval sert de socle. Chez Barnum et Pinder, c’est la question du corps qui se réinvente au milieu de la jungle, capturant une vitesse animale pour la dominer, rattrapant une liane pour se jouer de l’air ; un rêve du corps qui s’envole dans le prolongement et l’essor du transport aérien. Aujourd’hui, l’homme s’est paradoxalement rapproché du sol dans sa représentation. Une manière de réaffirmer sa condition, proche des autres et de ce qu’ils veulent bien voir. Le cirque contemporain ne se tape pas la tête contre les murs, il tente le possible des possibles dans une attente valable pour tous.

Texte : Karim Grandi-Baupain
Photo : Hèléne Albaladejo

Les 10 et 11/03 aux Théâtre acrobatiques, Anciens abbattoirs. Rens. 04 42 24 09 21