10 years DFA Records au Cabaret Aléatoire

10 years DFA Records au Cabaret Aléatoire

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House of music lovers

Le label new-yorkais DFA fête ses dix ans, et se donne à écouter en version « club » lors d’une escale au Cabaret Aléatoire. Enjoy.

L’anecdote est célèbre : à la fin des années 90, un musicien américain issu du punk-rock découvre les drogues de synthèse, et parallèlement qu’il peut y avoir une vie après le cap de la trentaine, sur le dancefloor (et sous la grosse boule à facettes). Bien sûr, l’anecdote est un peu réductrice, mais elle en dit long sur cette décennie qui se termine alors… Le type en question, au physique de Bisounours mal léché, c’est James Murphy. Il a joué dans divers groupes de la scène dite alternative, est ingénieur du son, et cherche à faire quelque chose de tout ce qu’il a acquis : un certain sens du désordre, un vrai talent de producteur, mais aussi le goût du crossover entre les genres. Surtout, James Murphy est new-yorkais. Il aime profondément sa ville, son champ des possibles, sa vie qui transpire par tous les pores, et bien sûr son histoire musicale – ici est né le punk (au club CBGB), la disco (dans le Loft de David Mancuso) et plein d’autres choses passionnantes entre ces deux genres… dont la « no-wave ». Ce dernier courant musical, symptomatique d’une Grosse Pomme en pleine ébullition à la charnière des années 70 et 80, Murphy saura s’en souvenir. Et lorsqu’il rencontre Tim Goldsworthy, producteur anglais qui sort tout juste d’aventures tout aussi transversales au sein du label Mo’Wax, il sait qu’il tient enfin quelque chose.
Trois initiales, pour « Death From Above » (du nom des soirées qu’il organise dans différents bars) : ce sera un label, sur lequel il sortira la musique de ses potes, ceux avec qui il partage une même vision érudite mais hédoniste de la musique. A la grande surprise des intéressés, les trois premiers maxi-vinyles de DFA déclenchent une tornade : House of jealous lovers de The Rapture (revisiter James Chance), By the time I get to Venus de Juan MacLean (réunir Kraftwerk et Giorgio Moroder), et enfin Losing my edge de LCD Soundsystem (écouter Mantronix produire la rencontre de The Fall et Can). A partir de là (on est en 2002), DFA va devenir l’épicentre d’une nouvelle scène partagée entre ses racines rock et ses vélléités « dance », puis progressivement s’imposer comme un label aux oreilles sûres, grand ouvertes, mais parfaitement cohérent dans ses choix et sa démarche (indé, il fera distribuer ses disques en Europe par une major tout en gardant un contrôle artistique total). D’abord, en laissant grandir LCD Soundsystem, le projet du taulier, qui reste l’un des trois groupes les plus passionnants des années 2000. Ensuite, en signant des artistes aussi artistiquement proches (Juan MacLean, Hercules & Love Affair, Shit Robot) que radicaux et singuliers (Black Dice, Planningtorock, Syclops…). Enfin, en se forgeant une identité disco lorgnant vers la house (qui en découle) via la sortie de plus en plus fréquente de maxis. Car lorsqu’il s’agit de plonger son nez dans la disco, les mecs de DFA s’en foutent plein les narines. Toute l’esthétique DFA est tournée vers cet âge d’or : celui des clubs où l’on laissait rentrer tout le monde, si tant est que chacun se laisse porter par cette vibration libertaire qui émanait des baffles, et en finisse au moins pour un soir, une nuit, avec toutes ces barrières qui sont le quotidien de nos vies.
Dix ans, donc et déjà, que DFA fait avancer la musique. Pas forcément en le cherchant, comme pourrait le faire un Warp lorsqu’il tend à croiser musiques électroniques et rock. Mais plutôt en faisant les choses au feeling, pour le plaisir, en revendiquant clairement de puiser dans l’Histoire pour mieux se tourner vers l’avenir. En cela, DFA est le premier des labels à avoir popularisé une conception du recyclage née dans les années 90, car il l’a fait en y apportant de la valeur ajoutée, propre à son époque. Définitivement visionnaire.

PLX

10 years DFA Records, le 11 au Cabaret Aléatoire à 22H, avec aux platines Juan MacLean, Shit Robot, Dj Paul et Dj Steef
www.dfarecords.com et www.crownrebels.com