Fondation Vincent Van Gogh © Raphael Hefti

Van Gogh live ! – Couleurs du Nord, Couleurs du Sud à la Fondation Van Gogh

Goûts de lux

 

Si Van Gogh a fait d’Arles l’un de ses sujets de prédilection, la commune ne lui avait pas, jusqu’ici, rendu l’hommage que le peintre méritait. C’est désormais chose faite avec la Fondation portant son nom, inaugurée voilà deux mois.

 

C’est au détour d’une rue étroite, typique du centre historique d’Arles, que l’on aperçoit, sur un portail monumental conçu par Bertrand Lavier, la signature caractéristique du peintre. Elle signale l’entrée du nouveau bâtiment de la Fondation Van Gogh, inauguré en avril dernier.
Le passage du Néerlandais en Arles aura duré quinze mois. Bien que bref, il sera prolifique. Il peindra plus de deux cents tableaux, certains parmi ses plus célèbres, élevant la ville et ses paysages environnants au rang d’icône. De ce séjour, la ville d’Arles ne possède rien, si ce n’est une impasse portant son nom et de nombreuses cartes postales.
Il aura fallut vingt ans pour que l’association Van Gogh, initiée en 1983 par Yolande Clergue, devienne, sous l’impulsion de Luc Hoffmann, une fondation reconnue d’utilité publique. Dépourvue de tableaux du maître, elle a en revanche accumulé de nombreuses peintures, sculptures, manuscrits et photographies d’artistes internationaux lui rendant hommage. Elle a pour ambition de présenter régulièrement des originaux, prêtés par des musées internationaux, afin de les mettre en perspective avec le travail d’artistes contemporains. Le Musée Van Gogh d’Amsterdam s’est ainsi engagé à prêter « au moins une œuvre de l’artiste par an ».
Couleurs du Nord, Couleurs du Sud retrace l’évolution chromatique du peintre en présentant neuf tableaux de Van Gogh associés à ceux de ses contemporains l’ayant fortement influencé, dont Gustave Courbet, Claude Monet et Paul Gauguin. Elle évoque sa recherche de lumière, son intérêt pour la colorimétrie à travers sa fascination pour les estampes japonaises, ou encore sa correspondance écrite avec son frère Théo.
Le visiteur déambule dans un espace muséal de mille mètres carrés, assez sombre, ultra sécurisé, scénographie par Gary Hume. Dangereuse pour la conservation des œuvres, la lumière méridionale tant recherchée est peu perceptible. Le parcours, dense, est ponctué par des terrasses extérieures en bois, contrastant fortement avec l’austérité intérieure de cet ancien hôtel particulier, mis à disposition par la mairie et réhabilité pendant plus de trois ans par les architectes Fluor. Elles sont des respirations, offrant un panorama sur la chaîne des Alpilles et les toits de la ville, rappelant le lien entre l’œuvre et sa source d’inspiration.
Bice Curiger, directrice artistique de la Fondation, présente en parallèle les contributions de six artistes contemporains : des peintures d’Elizabeth Peyton, des dessins de Guillaume Bruère alias GIOM, un film de Béthan Huws, les installations de Camille Henrot. Si ces derniers conservent un rapport classique de mise à distance du spectateur à l’œuvre, Fritz Hauser et Thomas Hirschhorn la décalent. Le premier installe une œuvre sonore dans la cage d’escalier. Au fur et à mesure que l’on gravit les marches, les traits sur les murs apparaissent associés aux bruits enregistrés puis mixés de l’installation. Le second immerge le visiteur dans l’imaginaire d’une fan japonaise. Il recrée un univers emballé de papier aluminium, foisonnant de références de textes, de citations, de bibelots, de cartons, de petits mots, et de bouts de papiers. L’exubérance perturbe par la proximité créée, le visiteur ne sachant plus ni où marcher ou regarder.
L’installation d’un musée en ville pose la question de son interaction avec les habitants. En quoi l’œuvre d’un artiste change-t-elle la perception de ce que l’on voit ? Peu de musées arrivent à interagir avec leur contexte. La verrière contemporaine qui domine le parvis d’entrée met à distance l’ancien bâtiment, invitant à s’y rendre. Sur son toit est installée l’œuvre pérenne de Raphaël Hefti. Issue d’un travail avec les architectes, elle est composée de 78 pièces de verres multicolores. Elle inonde et habille l’espace intérieur de la boutique, la façade et la place de reflets colorés, mouvants au gré de la progression et de l’intensité des rayonnements solaires. Autant d’instantanés qui offrent au riverain une vision éphémère, sans cesse renouvelée du musée, rappel de la fascination du peintre pour la lumière méridionale.

Clothilde Berrou

 

Van Gogh live !Couleurs du Nord, Couleurs du Sud : jusqu’au 31/08 à la Fondation Van Gogh (35 rue du Docteur Fanton, Arles).
Rens : 04 90 93 08 00 / www.fondation-vincentvangogh-arles.org