Splice (France/Canada – 1h47) de Vincenzo Natali avec Sarah Polley, Adrien Brody, Delphine Chaneac… (sortie 30/06)

Splice (France/Canada – 1h47) de Vincenzo Natali avec Sarah Polley, Adrien Brody, Delphine Chaneac… (sortie 30/06)

Tel est pris qui croyait prendre

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Déception. Voilà le mot qui vient à l’esprit à l’issue du dernier opus de Vincento Natali. Après s’être frotté à la comédie avec un demi-succès (Nothing), le réalisateur formé à l’animation et auteur d’œuvres réussies comme Cypher et, surtout, Cube, a décidé ici de revenir à ses premières amours : le fantastique. Ou comment deux scientifiques de génie décident de braver un tabou en collant (splice) l’ADN d’un humain avec celui d’un animal pour donner naissance à une nouvelle créature — sans se douter qu’ils ont ouvert la boîte de Pandore. Le film est d’ailleurs lui-même un hybride entre le film de genre, ici l’épouvante, et le film à caractère informatif, avec un propos non dénué d’intérêt sur les dérives de la science et les difficultés de la parentalité. Celles-ci sont mises en évidence à travers l’évolution des relations entre ces parents scientifiques et leur créature enfant, dont la jalousie de femme vis-à-vis de sa mère d’adoption va grandir : le complexe d’Electre n’est donc pas loin. Bénéficiant aussi d’une actualité sociétale riche, avec la création récente de cellules vivantes sans arbre généalogique, d’un producteur exécutif de renom (Guillermo Del Toro), d’un acteur en vogue (Adrien Brody) et d’effets spéciaux bluffants de réalisme qui ne déplairaient pas à un Matthew Barney, le film avait ainsi tout pour séduire sur le papier. D’autant que les nombreuses scènes filmées en caméra subjective donnent l’impression au spectateur d’observer les protagonistes à travers un judas grossissant et le renvoient à une position de voyeur face à certains interdits, qu’ils soient sexuels ou horrifiques. Aux deux tiers du film, l’on doit pourtant se rendre à l’évidence : tout comme le pouvoir de l’argent semble l’avoir emporté sur l’éthique, il a dû aussi pervertir le cinéma d’auteur de Vincenzo Natali. Comment expliquer sinon que Splice tourne au grand guignol avec un enchaînement de scènes bien trop prévisibles ? Espérons que Monsieur Natali accouchera d’une œuvre plus conforme à nos attentes avec l’adaptation du roman culte de William Gibson, Neuromancer, qu’il prépare actuellement.

Guillaume Arias