Semi-pro - (USA – 1h30 – 2007) de Kent Alterman avec Will Ferrell, Woody Harrelson…

Semi-pro – (USA – 1h30 – 2007) de Kent Alterman avec Will Ferrell, Woody Harrelson…

Trous de balles

cine-semi-pro.jpgDepuis la secousse sismique et débilitante qui a frappé Hollywood en 1994, via l’irrésistible autant qu’affligeant Dumb and Dumber des frères Farrelly, la comédie américaine a définitivement changé de visage(s), laissant derrière elle des icônes 70-80’s exsangues (Steve Martin, Stevy Chase, Eddie Murphy, Leslie Nielsen…), tout en ouvrant la voie à une nouvelle race de comiques — à la fois dérangés, dépressifs, régressifs, en surchauffe ou inquiétants. Depuis quatorze ans, donc, le rire (jaune) US vit n’importe comment au rythme de trois cinéastes majeurs : Wes Anderson (La vie aquatique), les frères Farrelly (Mary à tout prix) et Judd Apatow (En cloque, mode d’emploi) ; avec leur tribu d’acteurs complètement barrés, tous issus du mythique et inusable show de NBC, le Saturday night live : Ben Stiller, Owen Wilson, Steve Carell, Jack Black, Vince Vaughn et Will Ferrell. Aussi méconnu en France qu’énorme de l’autre côté de l’Atlantique, ce dernier, à l’affiche de ce Semi-pro gentiment foutraque, continue, film après film, de creuser le même sillon transformiste et d’hébétude explosive qui l’a vu jouer depuis dix ans, grimaces et perruques ahurissantes à l’appui, un styliste maléfique (Zoolander), un présentateur télé texan idiot (La légende Ron Burgundy), un dealer mou du gland (Starsky & Hutch) ou un patineur à glace raté (Les rois du patin). En campant ici Jackie Moon, propriétaire et joueur de l’équipe de basket des Flint Tropics, Will Ferrell nous donne à voir sa vision du basket, burlesque et modeste, librement inspirée des 70’s, où se mêlaient alors sur le parquet coupes afro, dunk en souplesse et joueurs funky-cool qui voulaient moins réussir leur match que la troisième mi-temps avec les pom-pom girls en écoutant les Brothers Johnson. Ou le sacre d’une certaine idée de l’amateurisme, avant l’avènement de la très professionnelle et lucrative NBA, avec la nostalgie des Harlem Globe Trotters d’antan plutôt que les Spurs de San Antonio d’aujourd’hui. La scène d’ouverture est en ce sens représentative des enjeux inexistants du film : introduits par un speaker en folie à leur entrée sur le parquet, les joueurs voient leurs coucheries, casiers judiciaires et scandales en tous genres dévoilés et énumérés au public en lieu et place des statistiques habituelles. Quand un chapelet d’horreurs se substitue au tableau d’honneur, les basketteurs de Ferrell ont tout compris, l’important était bel et bien de participer.

Henri Seard