L’Interview : Lydie Marchi

L’Interview : Lydie Marchi

A l’occasion du Printemps de l’Art Contemporain, Lydie Marchi, co-présidente de Marseille Expos, mais aussi directrice de la galerie Saffir, nous parle des temps forts de cette troisième édition et nous explique où en est l’art contemporain à Marseille.

Lydie%20MARCHI.jpgMarseille Expos, c’est qui, c’est quoi ?
L’idée des membres fondateurs (Sextant et plus, Histoire de l’œil, RLBQ, la GalerieofMarseille et Buy-Sellf), c’était de mutualiser les ressources pour la diffusion et la production de l’art contemporain, et ainsi donner une visibilité à la scène artistique marseillaise. RLBQ et Buy-Sellf ont fermé, mais nous comptons aujourd’hui vingt-quatre structures, qui travaillent autour d’un espace et d’outils de communication : une plaquette mensuelle, un site Internet et le PAC, qui est un moment fort, un focus sur nos programmations et nos différentes actions.

Il y a de gros écarts en termes de moyens et de visibilité entre les membres du réseau. Comment faites-vous pour harmoniser tout ça et fédérer les différentes structures ?
C’est vrai qu’il y a des différences, mais quand on regarde les chiffres, on s’aperçoit que ce ne sont pas les plus grosses structures qui enregistrent le plus de visiteurs. L’intérêt commun à tous les membres du réseau, c’est d’obtenir plus de visibilité, par tous les publics. Idem pour le PAC : il s’agit de fédérer de plus en plus de monde et de faire en sorte que le Printemps ne concerne pas que le milieu de l’art. Autrement dit, d’aller vers un public qui ne serait a priori pas concerné par l’art contemporain et surtout de l’amener à apprécier ce qu’il voit, d’où l’importance de la médiation… Une action comme le Printemps de l’Art Contemporain nous permet de faire connaitre nos structures, on y gagne tous !

Le réseau comporte des galeries associatives et des galeries privées. On pourrait penser que les subventions allouées à Marseille Expos sont autant de soutiens financiers dont les structures elles-mêmes ne bénéficieront pas…
Marseille Expos ne compte pas que des galeries, mais aussi des ateliers comme les Ateliers de l’Image et, depuis septembre, les Editions P. Nous cherchons vraiment à inclure tous les acteurs qui jouent un rôle, de quelque façon que ce soit, dans d’autres façons d’aborder l’art contemporain. En ce qui concerne les subventions, je ne peux pas me prononcer, il faudrait connaître les chiffres. Or, personne ne connaît le montant des subventions allouées à chaque structure. Les subventions déclinent, c’est un fait, mais rien ne permet d’affirmer qu’il y ait un jeu de vases communicants. D’autant que Marseille Expos ne bénéficie pas d’énormes subventions, juste de quoi payer le poste de coordinatrice et assumer la communication, les plaquettes, le PAC, etc. Cela profite à tout le monde.

Buy-Sellf et RLBQ ont fermé, Dunkan et Hourdequin partent à Paris… Pensez-vous qu’il y a une difficulté particulière liée à Marseille concernant l’art contemporain ?

Oui, les structures sans fonds privés vivent grâce aux subventions, qui diminuent, à Marseille et ailleurs. Les arts visuels sont depuis toujours les plus mal lotis. Mais notre vrai problème, c’est le public, qui ne reçoit pas le goût des arts à l’école. Les arts plastiques et l’histoire de l’art ne sont pas enseignés dans les cursus généraux. Cela ne fait pas partie des clés que l’on donne aux gens. Le PAC concerne quand même trente lieux, ce qui est beaucoup. Ce sont ces lieux qui pallient le manque d’une grosse structure d’art contemporain.

Pensez vous qu’il existe un public pour l’art contemporain à Marseille ?
Absolument ! Il y a un public fidèle à chaque exposition, des gens qui appellent pour prévenir de leur visite et qui souhaitent que je sois là pour les accompagner et leur donner des éléments pour aborder les œuvres. Il y a aussi un public plus discret, qui passe régulièrement sans rien demander, et le petit public de collectionneurs, pas « les légendes », mais des gens avec un peu de moyens, issus de professions libérales, qui achètent au coup de cœur. Depuis peu, je vois aussi des étudiants des Beaux-Arts, ainsi que des lycéens, venir sur les conseils de leurs profs, parce qu’ils savent que je vais leur expliquer ce qu’ils vont voir. Pour mieux connaître tous ces publics, Marseille Expos vient de mandater une sociologue bénévole, qui va réaliser une étude, pendant deux mois, via un questionnaire.

Quelles sont les spécificités de cette troisième édition du PAC ?
Le gros changement, c’est le choix d’une thématique commune, le solo show, qui se décline autour de quatre axes : un artiste ou une thématique, une figure, comme Katy Acker, ou un médium, comme la photo chez Vacances Bleues. Cette année, nous avons aussi invité d’autres structures qui ne peuvent ou ne veulent pas appartenir à Marseille Expos, comme Vacances Bleues, le [mac], l’Atelier Tchikebe, les Pas Perdus ou l’American Gallery, où aura lieu le brunch de clôture du PAC et qui met à l’honneur Judith Bartolani, une figure importante de la scène artistique marseillaise. Autre nouveauté : le colloque du 13 mai, à l’initiative de la Chambre de Commerce et d’Industrie Marseille Provence (CCIMP), sur les systèmes économiques du monde de l’art, animé par des animateurs marseillais, ou pas ! L’intérêt du PAC, c’est aussi d’utiliser ce temps fort pour inviter des personnalités de l’art contemporain à (re)venir à Marseille et montrer qu’il existe ici une dynamique et un potentiel. Travailler avec la CCIMP, c’est aussi se rapprocher de ce public que sont les entreprises et leurs acteurs. Enfin, nous avons invité le réseau Botox, l’alter ego niçois de Marseille Expos. Sur le principe d’un échange, ils seront ici le 13, puis Marseille Expos ira à Nice le 28.

Quels sont vos coups de cœur de l’édition 2011 ?
J’ai très envie de voir Peter Granser à l’Atelier de Visu et André Fortino chez Territoires Partagés. Je ne connais pas bien leur travail et les visuels m’ont vraiment donné envie ! Je suis aussi curieuse de voir le travail des élèves du collège de la Belle de Mai. Et puis, bien sûr, Caroline Duchatelet à la Compagnie, Julien Salaud chez Bonneau-Samames, Berdaguer & Péjus, dont je suis fan, à la GalerieofMarseille… Sans oublier Béatrice Cussol chez Porte-Avion, dont je trouve le travail à la fois trash, poétique, engagé et puissant, Katy Acker chez Triangle et bien sûr Judith Bartolani, dont j’aime le travail et qui est une si belle personne ! Bref, j’ai envie de tout voir ! Sans compter mon accrochage à Saffir, celui de Maciek Stepinski, dont le projet est lauréat 2010 de Mécènes du Sud.

Le réseau Marseille Expos a-t-il des projets pour Marseille Provence 2013 ?
Oui nous sommes en relation avec eux. Thierry Roche nous a contactés, il veut savoir qui nous sommes et voir s’il est envisageable de travailler ensemble.

Propos recueillis par Céline Ghislery

Printemps de l’Art Contemporain : du 12 au 14/05 dans les galeries du réseau Marseille Expos.
Colloque « Les systèmes économiques du monde de l’art – Art/entreprise » : le 13/05 à la CCIMP (Palais de la Bourse, 22 La Canebière, 1er)
Rens. www.marseilleexpos.com