L’Interview : Alexandra Tobelaim

L’Interview : Alexandra Tobelaim

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Accompagnée du comédien Solal Bouloudnine, la metteuse en scène et fondatrice de Tandaim revient sur la dernière création de la compagnie, évoquant les relations étroites que peuvent entretenir théâtre et football. Italie-Brésil 3 à 2, ce n’est pas seulement le récit du match qui a mené l’Italie en finale de la Coupe du monde en 1982, mais aussi et surtout l’histoire d’une famille sicilienne, de leurs voisins et amis suspendus au téléviseur acheté pour l’occasion.

Pourquoi avoir monté cette pièce ?
C’est une histoire très étonnante : en septembre 2010, le texte de Davide Enia nous a été imposé dans le cadre d’une lecture mise en espace pour ActOral. Il y a eu une vraie rencontre entre Solal, Jean-Marc Montera (ndlr : musicien, fondateur du GRIM), le texte et moi. On a eu très envie de le faire vivre sur un plateau, tout comme l’équipe du Gyptis. Davide Enia fait partie du mouvement italien du Théâtre-récit, écrit par des acteurs/auteurs, dans lequel il y a un vrai désir de parler au public, de raconter une histoire.

Faut-il aimer le foot pour apprécier la pièce ?
Franchement, je ne pense pas que cela soit nécessaire ; moi-même je n’aime pas le foot et n’en connais pas les règles, contrairement à Solal et Jean-Marc. Mais dans la pièce, il y a ce partage, cette oralité pendant le match ; on retourne à l’essence même du théâtre, d’un acteur qui raconte quelque chose à un public. Le texte possède un immense pouvoir évocateur, il nous plonge instantanément le 5 juillet 1982 à Palerme. Bien que l’on connaisse le résultat, ce match Italie-Brésil comporte une chose propre au sport et au spectacle vivant : un vrai suspense. Les Italiens mènent deux fois contre la meilleure équipe du monde, avant d’être rattrapés au score, puis de finir par l’emporter. Les différentes émotions ressenties par les spectateurs donnent une oscillation très intéressante, entre exaltations et déceptions. On frise quasiment la crise cardiaque à chaque action ! Ce match rassemble la famille, les amis et les voisins ; chaque spectateur peut retrouver des souvenirs d’enfance, un retour aux sources dans les à-côtés, les rituels des spectateurs. Par exemple, l’auteur a le souvenir précis du placement de chaque membre de la famille autour du téléviseur. Solal et la musique de Jean-Marc sont les passeurs du suspense, mais aussi du partage et de la communion avec cette grande famille.

Comment la musique de Jean-Marc Montera s’intègre-t-elle au spectacle ? Y a-t-il une place pour l’improvisation ?
Le travail a été de définir, pour chaque intervention musicale, une enveloppe globale dans laquelle on a essayé de préciser au maximum les choses. Mais — et c’est ce qui est aussi déstabilisant qu’intéressant pour moi — Jean-Marc est un improvisateur, qui construit les choses dans l’instant. C’est comme si nous avions défini une partition générale avec, en fonction de l’instant et de ce que ressentent Solal et Jean-Marc, des choses livrées à la représentation. Ce côté sans filet, cette liberté, c’est nouveau pour moi… et très excitant.

Avez-vous d’autres projets ?
On a le projet d’une résidence longue avec trois autres compagnies à la Minoterie, mais rien n’est figé pour le moment. D’autre part, on est dans une dynamique de diffusions de nos deux derniers autres spectacles, Villa Olga et La Seconde Surprise de l’amour. J’aimerais aussi prendre le temps de réfléchir à un nouveau projet pour la rentrée.

Quel est votre sentiment sur Marseille Provence 2013, capitale européenne de la culture ? Avez-vous des projets dans ce cadre ?
Pour moi, c’est encore assez nébuleux, bien qu’il y ait maintenant une belle dynamique. En tant que compagnie cannoise, nous ne sommes pas directement impliqués et n’avons pas déposé de projet. Nous avons seulement un regard extérieur, mais il me semble que c’est une très bonne chose en matière d’énergie et d’infrastructures pour Marseille et sa région.

Propos recueillis par Thomas Delahay

Italie-Brésil 3 à 2 par la Cie Tandaim : du 21 au 25/02 au Théâtre Gyptis (117 rue Loubon, 3e).
Rens. 04 91 11 00 91 / www.theatregyptis.com

Rencontre « Radio Bière Foot » avec l’équipe artistique le 9/02 à 19h au WAAW (17 rue Pastoret, 6e). Rens. 04 91 42 16 33
Rencontre-débat sur le thème « Sport & culture, des passerelles » à l’issue de la représentation du 23/02, avec Alexandra Tobelaim, Andonis Vouyoucas (directeur du Gyptis), Jean-Jacques Gilliard (directeur d’Espaceculture), Michel Hidalgo (ancien sélectionneur de l’Equipe de France), Cédric Dufoix (secrétaire général de l’OM) et Christian Bromberger (anthropologue)

A voir aussi : Villa Olga, le 13/02 au Théâtre Comœdia (Aubagne), dans le cadre de Région en Scène.
Rens. 04 42 18 19 88