Jumper - (USA – 1h30) de Doug Liman avec Hayden Christensen, Samuel L. Jackson…

Jumper – (USA – 1h30) de Doug Liman avec Hayden Christensen, Samuel L. Jackson…

Les blancs ne savent pas sauter

cine-Jumper-3.jpgL’aveu, terrible, vient du réalisateur lui-même, dans le dossier de presse : « On avait fait un premier montage qui durait deux heures. J’ai finalement retiré trente minutes, en rabotant tout ce que je pouvais, car le film s’adresse avant tout à un public jeune, à la génération MTV, peu habituée aux temps morts. » Voilà, si le pari est gagné pour la génération trépanée — le film a pété le box office US lors de son premier week-end d’exploitation et se verra offrir une suite —, les « vieux », comme moi, ne peuvent que tirer la gueule devant ce ratage/formatage grand format. Car Jumper, à la lumière de son synopsis, avec son héros bondissant et ses parties de cache-cache téléportées, avait tous les atouts en main pour devenir l’outsider des films de super-héros, une sorte d’alternative à l’hégémonie Marvel — écurie de Spider-man, Hulk, X-Men et autres Daredevil. Cela étant, si Jumper déçoit par son traitement clip/zapping, avec caméra épileptique et montage à l’avenant, saluons quand même la première demi-heure en mode « lo-fi » lorsque le scénario et la caméra donnent à voir la genèse du héros et ses premiers pas/sauts balbutiants — il faut voir le « jumper » se manger des arbres comme Peter Parker éjaculait des toiles d’araignées précoces. Dans ces moments-là, de calme avant la tempête (numérique), où le film n’interroge pas frénétiquement la question de l’espace et du temps, donc du montage, on se dit qu’il marche sur les traces d’une araignée raimienne ou d’une chauve-souris burtonienne. Hélas… Reste un casting top glamour, avec un Hayden Christensen revenu de sa trilogie étoilée et la très jolie Rachel Bilson échappée de Newport Beach, traqués par un Samuel L. Jackson en roule libre, relooké façon Djibril Cissé ; et des purs moments cinégéniques comme cette baston démarrée à Détroit puis prolongée au sommet d’une pyramide avant de se finir le bec dans l’eau d’un lac au Tibet. Au final, on sort de la salle le cerveau grillé et le cœur au bord des lèvres, ravi au fond de ne pas avoir vomi sur sa charmante voisine de dix-huit ans, mais terriblement déçu d’être passé à côté d’un hypothétique grand film.

Henri Seard