Tholos de Jeorg Ortner

Joerg Ortner – Tholos au cipM

A la renverse

 

A l’occasion des Littorales, le cipM expose la totalité des plaques imprimées de la série Tholos du peintre et graveur des poètes, Joerg Ortner, « le Dürer du XXe siècle ».

 

Le soir du vernissage, le poète Jean Daive, président du cipM et grand ami de Joerg Ortner, présente « le travail d’un mort, un mort qui n’est pas mort », le résultat d’expériences, d’études, qui donnent lieu à une certaine « science du négatif » (1). Science avec conscience, élévation de l’âme.
Pour reprendre le titre d’un recueil de poésie de Claude Royet-Journoud, autre ami du graveur, la série Tholos, tirée sur parchemin, évoque un renversement. Un renversement esthétique, philosophique : celui de l’inversion des valeurs d’ombres et de lumières.
A Jean Daive de nous raconter le début de l’histoire. Il y a d’abord un lieu : un grenier. Puis une rencontre, avec… le crâne d’un cheval. « Il m’attendait depuis deux cents ans », rapporte le poète. Le crâne de cheval, noir, recouvert de poussière, est sa première révélation de la construction de sa fiction du négatif.
Jeorg Ortner est né en Autriche en 1940. Il vit à Paris à partir de 1961, où il aura son atelier à Belleville. Il commence à travailler à l’Atelier Lacourière et Frélaut, réalisant deux moulages en plâtre pour Giacometti, et menant la restauration de l’ensemble du Plan Turgot, confiée par la Chalcographie du Louvre.
A Paris, l’artiste est très proche de poètes dits de la littéralité. Jean Daive, Claude Royet-Journoud, mais aussi Paul Celan ou Alain Veinstein. Tous ont en commun la volonté d’élucider la langue, de procéder par éliminations. Dans ses gravures, Jeorg Ortner emploie la technique des états. Une seule planche avec une image initiale donne lieu à différents états, plusieurs gravures. Le travail intérieur de l’artiste se révèle, son pouvoir de création tout autant que son pouvoir de destruction se voient sublimés dans l’œuvre même : au bout de plusieurs planches, un porche habité devient noir (jamais complètement), tandis qu’une forêt de cyprès intacte apparaît raturée, griffée.
On pourrait parler, comme en danse, de ses gravures comme différents « états de corps ». On pourrait parler d’un art vivant.

Sacha Steurer

Joerg Ortner – Tholos : jusqu’au 22/11 au cipM – Centre international de poésie Marseille (Centre de la Vieille Charité, 2 rue de la Charité, 2e).
Rens. : 04 91 91 26 45 / www.cipmarseille.com

 

 

Notes
  1. Titre de l’exposition qui présentait déjà Jeorg Ortner au cipM à l’été 2012[]