La Rumeur

Hip-Hop Society

Bien urbain

 

Du 11 au 24 avril, le festival dédié aux cultures urbaines Hip-Hop Society revient pour une édition largement dédiée à la transmission. Cette année, l’AMI — en collaboration avec le Cabaret Aléatoire et la Friche — a imaginé un programme très complet : accompagnement d’amateurs et d’artistes émergents, projets collectifs et temps forts musique et danse, le festival propose une programmation très riche, et des événements incontournables dans un paysage culturel où la représentation du hip-hop et de ses acteurs tend à manquer cruellement.

 

 

Cette année, la configuration d’Hip-Hop Society sera un peu particulière. Suite au Covid, l’Aide aux Musiques Innovatrices imaginait une version numérique en 2020. En 2021, les restrictions sanitaires appliquées au printemps puis à l’automne les ont fait s’interroger sur la manière de maintenir leurs activités en direction des cultures urbaines et du hip-hop. La question s’est tout particulièrement posée au sujet des activités proposées aux adolescents et aux artistes émergents. La programmation de cette édition s’apparente donc plutôt à un « parcours d’accompagnement » qui a été mis en place à l’automne dernier, et dont les résultats seront présentés lors de concerts et restitutions. « L’accompagnement s’est inscrit sur un temps long, ce n’était pas le format du festival précédemment, puisque les accompagnements étaient concentrés sur trois mois, précise Élodie Le Breut, directrice de l’AMI. « C’est un parti pris qu’on souhaite continuer à défendre, on constate quand même une fragilité des publics avec lesquels on travaille en ateliers. » En effet, les adolescents se sont sentis isolés durant la crise sanitaire dans leur rapport avec la structure et à la Friche en général, puisque les espaces de pratique auxquels ils avaient normalement accès sont restés fermés pendant très longtemps.

Cette année, l’atelier « My Squad Session » se transforme en « Bouge de ta Place », où l’accent a été mis sur le processus de création des artistes, du début — écriture, production sonore, vidéo-clip — jusqu’à la partie scénique qui inclut un nouveau temps d’écriture d’un répertoire de scène, et la relation avec le public, à l’espace. « Finalement, cet atelier répond au besoin des jeunes de la Friche de s’exprimer. »

D’autre part, l’ AMI a accompagné, dans le cadre des « sessions Garages », plusieurs artistes émergents. L’attention est mise sur la partie scénique, à la préparation de « shows ». Cette année, les artistes sélectionnés pour les Garages sont le groupe de rap Cymatic, qui a bénéficié d’une résidence scénique au Cabaret Aléatoire, ainsi que Bonnie’s House, collectif d’artistes féminines qui reçoit un accompagnement dans les Labobox de l’AMI. Les artistes se produiront sur scène au festival Impulsion le 13 avril à Aubagne, puis lors du concert de La Rumeur organisé le 23 avril au Cabaret Aléatoire.

Toujours dans cet esprit accompagnant, l’AMI est partenaire du projet Voi.iels, un dispositif dédié aux rappeuses et aux minorités de genre proposé par Sonica Vibes, le Cabaret Aléatoire et Baham Prod. Les participantes seront invitées à se confronter à l’exercice de l’improvisation dans le cadre de l’Open Jam organisée sur le Playground de la Friche le 23 avril.

Lorsque Village Hip-Hop s’est transformé en Hip-Hop Society en 2018, une profonde volonté de travailler avec la danse et ses acteurs a grandi au sein de l’équipe du festival, aussi bien dans le cadre de sa collaboration avec le festival Impulsion (le 13 avril) qu’avec l’école Cré’Scènes 13, à l’époque. Cette année, une soirée dédiée à la danse est organisée à la Friche le 16 avril, avec le spectacle Midi-Minuit par la compagnie Hylel, après sa résidence de création au sein des locaux de la Belle de Mai et une première représentation dans le cadre du festival + de Genres organisé par Klap. Le public aura également la possibilité de découvrir le spectacle Hip-Hop Nakupenda de la compagnie Par Terre, solo de danse du chorégraphe Yves Mamba né au Congo et dont le collectif est un des premiers organisateurs de battles dans son pays au lendemain de la guerre. Ce spectacle, mis en scène par Anne Nguyen, mixe danse contemporaine, danse afro et hip-hop, et nous raconte en mouvements le parcours de résilience et de professionnalisation du chorégraphe.

Dans l’idée d’un « passage d’une discipline à l’autre », le danseur Mofak s’est orienté dans une carrière musicale après avoir écumé nombre de battles et de danse debout. Il jouera après les deux spectacles de danse du 16.

Autre temps fort du festival, la Jam The Playground est, plutôt qu’une battle, organisée « autour du jeu et du dépassement de soi, valeurs centrales du mouvement hip-hop et les cultures urbaines en général. » Participants professionnels et amateurs se rencontreront dans un esprit constant de transmission : le MC K-Méléon sera le maître de cérémonie de cette « battle » géante orchestrée par un live band réunissant le rappeur Dj Djel, le beat-boxeur Micflow, le musicien Labo K et le danseur Frankie (de la compagnie Les Misérables).

Niveau concerts, la date du 21 avril est à entourer, puisque le Cabaret Aléatoire nous offrira des retrouvailles avec le groupe La Rumeur, regretté porteur du flambeau du rap politisé, qui sort un cinquième album, neuf ans après la sortie de Tout brûle. La soirée sera également l’occasion de découvrir les Djs du collectif Sixtion, pour une clôture de soirée entre hip-hop, trap et dance-hall. « La culture hip-hop a pu être, à un moment donné, scindée entre un versant danse et un autre musical. On veut mettre tout ça en mouvements ! »

Entre autres nombreux rendez-vous et multiples « croisements » avec les manifestations et structures culturelles locales (Klap, Biennale des Écritures du Réel, Impulsion, Théâtre Massalia, Radio Grenouille…), Hip-Hop Society est un « grand tricot, basé sur des partenariats forts. » L’AMI aspire à apporter une « note d’espoir dans un temps politique et économique particulièrement compliqué pour la jeunesse » et espère amener à « souffler et réfléchir sans injonction et essayer de se projeter dans l’avenir malgré tout. »

 

Lucie Ponthieux Bertram

 

Hip-Hop Society : du 11 au 24/04 à la Friche La Belle de Mai (41 rue Jobin, 3e).

Rens. : www.hiphopsociety.fr