Edito 222

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Contrôle d’identité

L’islam a mauvaise presse. Un rappeur avisé met à profit ce malheureux désamour en distribuant avec son album un T-shirt malicieusement siglé : « I’m muslim, don’t panik » (1). L’affligeante mésaventure de ce petit garçon prénommé Islam donne encore à réfléchir. Pour le faire participer à son jeu télévisé favori sur la chaîne de télévision pour enfants Gulli, les responsables du programme ont demandé à ses parents de changer son prénom à l’antenne car, leur a-t-on expliqué, « il faut que vous compreniez que le nom de votre enfant fait référence à une religion que les Français n’aiment pas beaucoup. Cela pourrait choquer. » Pour le moins, effectivement. De fait, le message est clair. La télévision entretient dans l’esprit des Français une méfiance à l’égard des musulmans et de leur religion. Pire. Depuis que les tours jumelles de New York se sont effondrées et que les attentats à la bombe frappent à l’aveugle en Europe, l’œil des médias agite l’épouvantail du terroriste fou d’Allah. Et, à force de répétition, accole trop souvent islam et terrorisme pour être honnête. Nous vivons ainsi depuis 2001 dans une ambiance délétère qu’exploitent tous les marchands de peur. En 2005, un journal danois de droite provoque l’opinion publique des pays musulmans en publiant les médiocres caricatures du prophète Mahomet. Le Pape fustige l’année d’après, dans un discours à l’université de Ratisbonne en Allemagne, un islam violent. Une élection présidentielle se pointe en 2007 ? On voit fleurir dans les boîtes aux lettres les pires slogans sur « l’islamisation de la France » ou l’entrée menaçante de la Turquie en Europe. Une telle bassesse finit par échauffer les esprits. Ce week-end, une mosquée a été incendiée. Quinze jours avant, c’était un cimetière musulman qui était saccagé. Nicolas Sarkozy a dénoncé un acte relevant du « racisme le plus inadmissible qui soit ». Plutôt que d’imaginer un racisme plus admissible, on peut légitimement s’inquiéter de l’apparition de ces actes odieux. Jusqu’où ira la vague anti-islam ? Jusqu’à la guerre des civilisations tant redoutée ? Dans un discours d’août 2007 aux Ambassadeurs de France, le président de la République a déclaré que le principal défi international du pays était « de prévenir une confrontation entre l’islam et l’Occident ». Est-ce une volonté de circonscrire l’incendie ou de souffler sur les braises ? La réponse est dans la question.

Victor Léo

Notes
  1. Pour les anglophobes : « Je suis musulman, ne paniquez pas ! »[]