Du cinétisme à l’art numérique à la Fondation Vasarely

Du cinétisme à l’art numérique à la Fondation Vasarely

De l’architecture à la lumière…

A la Fondation Vasarely, l’exposition Du cinétisme à l’art numérique, présentée dans le cadre du festival Seconde Nature, fait honneur à l’appellation du lieu dans les années 60 : la « Cité polychrome du bonheur ». Un parcours à découvrir tous sens en alerte.

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Conçue comme un dialogue entre des œuvres pionnières du cinétisme (signées Victor Vasarely, Nicolas Schöffer, Vera Molnar…) et des créations numériques contemporaines, lumineuses, sonores, plastiques ou multimédia, l’exposition nous projette dans un univers ludique ou onirique, à la spatialité bien réelle et illusionniste à la fois. La force des installations choisies pour ce lieu provoque une présence active du spectateur, lui confère une seconde nature basée sur la perception, l’expérimentation et la déambulation.
Au centre de la première salle, monumentale et historique, Framework du groupe Lab[au] transforme la confrontation avec les grandes « intégrations » de Vasarely en réactivant les principes fondateurs de la démarche de l’artiste. Frame, le cadre, le carré se retrouve dans une composition répartie de modules eux-mêmes divisés en éléments carrés qui sont tour à tour statiques, mobiles, blancs ou noirs, jouant sur la fameuse opposition de l’Op’art, ou bien sur une couleur progressivement communiquée par des diodes. Le socle abrite quant à lui cinquante capteurs infrarouges, permettant à la sculpture d’interagir avec le déplacement et la position des visiteurs.
Des mêmes artistes, PixFlow et Swarmdot traduisent sur écrans les règles de comportements de groupes (d’organismes vivants ou artificiels) en un jeu abstrait et sans fin, de points et lignes qui traversent les surfaces de ces écrans. Subtilement, l’ombre projetée au mur de ces sculptures-totems nous incite à regarder l’avers, à découvrir en transparence le ventre informatique des ordinateurs en batteries et à rêver d’un art technologique qui revendique toutes formes de poésie, même celle des temps modernes.
La pièce de l’artiste Zimoun, masquée à l’entrée par une cimaise, s’écoute avant d’être vue, un prétexte pour fermer les yeux. Que découvrir avec le seul son perçu ? Un paysage de pluie battante ? Les bruits d’une machinerie industrielle en pleine production ? La simplicité structurelle de cette œuvre également poétique crée une série d’interactions et de mouvements qui allient en permanence l’organique et l’artificiel, l’environnement naturel et l’industrie.
Carsten Nicolai construit avec sa Dream-machine une sculpture en mouvement et en flash de lumière qui vise à expérimenter les effets de la stimulation audiovisuelle sur la perception humaine. Ryogi Ikeda explore quant à lui la transcription des flux de données scientifiques, cartographiques et biologiques qui circulent dans le monde, afin de faire apparaître concrètes, ces informations invisibles, non sans relation avec La tour sans fin de Vasarely implantée à proximité.
Le point nodal de ces compositions se situe à la jonction entre architecture, urbanisme, lumière, technologie, ingénierie scientifique et démarche artistique sonore ou visuelle. On y reconnaît le processus de travail transdisciplinaire, collaboratif, qui intéressait déjà les précurseurs du XXe siècle, héritiers des recherches de Bauhaus. Ceux-ci s’inspiraient, à l’instar des créateurs-développeurs d’aujourd’hui, des bouleversements engendrés par le développement des technologies de leur époque.
Certains des concepts explorés par la nouvelle génération sont vieux de près d’un siècle ou ont fait l’objet d’un traitement particulier à travers différents mouvements : Dada, Fluxus, le GRAV…. Ils ont en commun de privilégier les instructions formelles, la notion de concept, d’événement aléatoire, de participation du public, et de remettre en cause l’unicité, la matérialité de l’objet. Alors, laissons la question d’un art dit « numérique » en suspens, pour raviver nos sensations et nos regards.

Texte : Christine Maignien
Photo : Framework par LAb[au]

Du cinétisme à l’art numérique : jusqu’au 11/07 à la Fondation Vasarely (1 avenue Marcel Pagnol, Aix-en-Pce). Rens. 04 42 27 81 02 / www.fondationvasarely.fr
A suivre également jusqu’au 10/07 l’expo à Seconde Nature (27 bis rue du 11 novembre, Aix-en-Pce). Rens. www.secondenature.org/