ça planche n° 188

ça planche n° 188

Duplex, par la Cie Grenade
Falesa, d’après Robert-Louis Stevenson par le Théâtre du Maquis
Papiers d’Arménie, de Caroline Safarian. par Sketch Up Cie
Pinocchio d’après Carlo Collodi par le Badaboum Théâtre

Duplex
_Par la Cie Grenade
Ils sont neuf. Neuf danseurs coincés entre quatre murs blancs, sans repères, sans souvenirs, sans langage commun. Seuls au milieu des autres. Avec les autres. Contre les autres. Mais chargés d’émotions, d’angoisses, de manies, d’envies que l’isolement et l’enfermement font ressurgir violemment. On connaît les danseurs de Josette Baïz : impressionnants de présence et de technicité. La chorégraphe — qui fait danser les enfants et les ados depuis la création du groupe Grenade en 1992, puis de la compagnie du même nom — aime jouer avec la distorsion entre leurs physiques juvéniles et leurs interprétations fougueuses, presque impatientes. Leur énergie s’exprime par une danse métissée qui doit tout autant à l’héritage classique qu’au contemporain, au hip-hop qu’au jazz ou à la danse orientale, qui se nourrit de tout sans préjugés et qui mûrit en même temps que ses interprètes. Autrement dit, une danse qui devient adulte, exorcisant toutes les meurtrissures que les temps modernes produisent.
_Les 20 & 21 au Pavillon Noir (Aix-en-Provence)

Falesa
_D’après Robert-Louis Stevenson par le Théâtre du Maquis
Le théâtre n’est sans doute pas le lieu auquel on pense forcément quand il est question d’aventures et de contrées lointaines, de mystères exotiques et de poursuites dans la brousse. Détrompons-nous. En adaptant le roman de Stevenson pour les planches, le Théâtre du Maquis nous embarque avec brio pour un voyage au cœur du Pacifique post-colonial sur les traces d’un négociant victorien, qui devra affronter et la magie indigène, et le cynisme de l’homme blanc. Péripéties haletantes et passion amoureuse sont au centre de ce récit que Pierre Béziers met ingénieusement en scène, par l’intermédiaire d’une B.O. originale sans fausse note (signée Martin Béziers — on travaille en famille), de jeux de lumière, de projections et d’ombres chinoises de toute beauté. Déployant des trésors de malice, la compagnie aixoise fait surtout preuve d’une ironie peu commune, livrant ainsi un grand moment ludique, doublé d’une jolie réflexion politique.
_Le 20 à l’Espace Culturel Bonne Fontaine (Forcalquier)

Papiers d’Arménie
_De Caroline Safarian. par Sketch Up Cie
A partir d’avril 1915, le gouvernement Jeunes Turcs de l’Empire ottoman fait déporter et tuer une grande partie de la population arménienne. Comment, aujourd’hui, transmettre l’Histoire, raconter et faire reconnaître ce génocide, souvent ignoré, parfois nié ? Telle est la question que s’est posée Caroline Safarian avant d’écrire Papiers d’Arménie, qui constitue le pendant « lumineux » de sa précédente création, Black-out, sur la difficulté de la transmission de la mémoire dans les familles et la société. Une pièce qui exprime aussi et avant tout « (ses) sentiments, (ses) souffrances et (ses) espoirs qui ne sont pas représentatifs de ceux de tous les Arméniens. » Sans pathos et avec une certaine dérision, Papiers d’Arménie nous emmène dans un train où deux jeunes, « conditionnés par leur mémoire personnelle et l’amnésie collective, refont le chemin de l’immigration et de l’identité diasporique. » Une belle façon de célébrer l’Année de l’Arménie en France.
_Les 21 & 22 au Parvis des Arts

Pinocchio
_D’après Carlo Collodi par le Badaboum Théâtre
Connaissons-nous vraiment Pinocchio ? Que retenons-nous de cette créature née taillée dans un morceau de bois ? Un pantin qui a le nez qu’il pousse quand il ment, accompagné d’un criquet rigolo, penserons-nous immédiatement. La faute à Disney, qui a noyé l’esprit du livre de Collodi dans les bons sentiments que l’on sait. Le Pinocchio de Laurent de Richemond est tout autre, bien plus fidèle à l’original : orphelin rejeté parce qu’il est différent, petit être naïf et exploité, il s’agit avant tout d’un enfant qui essaie d’avancer dans un monde violent en découvrant sa propre cruauté. Pour théâtraliser l’univers fantastique de Collodi, le Badaboum Théâtre déploie des trésors d’inventivité, servant admirablement le jeu tout en finesse de Cécile Chèvre et des autres comédiens. Décor et bande-son évoquant la nature, jeux de rideaux, d’ombres et de lumières, costumes font de cette pièce un petit bijou, qui ravira tant les têtes blondes que leurs parents. _Du 24/04 au 12/05 au Badaboum Théâtre

CC