Around a Volta à la Galerie du Château de Servières

Around a Volta à la Galerie du Château de Servières

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Le plein des sens

Faisant suite aux échanges Marseille/Lisbonne/Dublin lors des Ouvertures d’Ateliers d’Artistes en octobre dernier, la nouvelle exposition de l’association Château de Servières réunit quatre artistes dont les œuvres basculent du merveilleux au déceptif en un clin d’œil.

Around a Volta s’appréhende d’abord dans la pénombre. L’exposition s’ouvre avec Cosmic Slop d’Aoibheann Greenan, un amas de pavés noirs, sorte de montagne monumentale, étincelante à la lumière de deux spots stroboscopiques, sur laquelle on distingue la figure d’un lion hiératique : figure sacrée ? Sculpture commémorative ? Totem ? La jeune artiste dublinoise affiche un certain tourisme spirituel. Elle emprunte les codes de représentations à des « façons de monstration » qui nous sont familières, appartenant à une sorte de culture universelle dont les us et coutumes s’assimilent à des marchandises commercialisables. Un regard critique que l’on retrouve chez Adam Gibney, qui s’interroge sur la manipulation des images, notamment celles de l’art, dont la reproduction inflige à la fois une perte de l’aura mais aussi une certaine popularité. Breakfast in Limbo, l’installation du Dublinois en boîtes de corn flakes, traite aussi bien de l’essai de Walter Benjamin L’Œuvre d’art à l’époque de sa reproductibilité technique que des méthodes d’endormissement de nos esprits critiques pour nous pousser à toujours consommer plus.
Un regard lucide et cynique sur l’époque que l’on retrouve dans l’installation de Susana Anagua, (Ir)reverible Systems, qui soustrait le visiteur à une déambulation dictée par les fils de coton tissés dans l’espace. L’artiste travaille sur les formes industrielles et mécaniques qui peuvent être assimilées au vocabulaire plastique de la sculpture abstraite cinétique. Elle mélange réel et virtuel en incorporant des éléments physiques dans des projections vidéos et crée de fait une ambiguïté entre les images, les formes et le son, qui englobe le visiteur et brouille sa perception des différents éléments constitutifs de l’œuvre. L’environnement hostile dans lequel nous sommes immergés rappelle les images froides du Metropolis de Fritz Lang. Quant à la position d’Antonio Gagliardi, elle est tout aussi ambiguë. On hésite entre poésie joyeuse, comme un hymne à la nature, comique ou burlesque de situation, humour grinçant ou posture satirique. L’installation Maisons d’oiseaux oscille ainsi entre émerveillement et inquiétude, quand on réalise qu’il s’agit là d’offrir un cadre idyllique à des oiseaux « privilégiés », mais que ce « village dans les nuages » pour volatiles n’en reste pas moins une cage…

Texte : Céline Ghisleri
Photo : Breakfast in Limbo de Adam Gibney

Around a Volta : jusqu’au 26/11 à la Galerie du Château de Servières (Ateliers d’artistes de la Ville de Marseille, 11/19 boulevard Boisson, 4e). Rens. 04 91 85 13 78 / www.chateaudeservieres.org