Un vent de liberté (autour de mai 68)

Plongée dans l’esprit libertaire et joyeux de 1968 à travers quelques films et cinéastes

L’Institut de l’image a déjà consacré plusieurs rétrospectives à Mai 68. Cette année nous proposons une nouvelle fois, à travers quelques films et cinéastes emblématiques, de replonger dans l’esprit libertaire et joyeux de 1968. Jean Vigo, en précurseur de ce mouvement de révolte contre toutes les autorités avec son sublime Zéro de conduite, a ouvert la voie ; Godard en France, Bertolucci en Italie et Fassbinder en Allemagne figurent parmi quelques-uns des plus incontournables réalisateurs qui ont accompagné ce vent de liberté.
Des films pour retrouver le souffle qui a accompagné le mouvement social et les luttes pour l’émancipation personnelle et culturelle d’une société encore très entravée par de nombreux carcans. Un mouvement qui permettra par la libération de la parole aux mouvements féministes de prendre leur ampleur comme en témoignent La Fiancée du pirate et Coup pour coup qui ressortent en salles pour l’occasion, ainsi que le court-métrage Albertine.
Et pour clore cette programmation, une question : que reste-t-il des idéaux de 68 dans la révolte des personnages de Nocturama ?
Deux invités, cinéastes, témoins et militants, Jacques Kébadian et Jean-Louis Comolli, viendront présenter leur livre « Les Fantômes de mai 68 », ainsi que plusieurs films, dont, en avant-première, L’Île de mai

Institut de l'Image - Cinéma de la Manufacture
Du 2 juin au 26 juin 2018
6/7 €
Rens. 04 42 26 81 82
www.institut-image.org
Cité du Livre - 8 rue des allumettes
13100 Aix-en-Provence
04 42 26 81 82

Article paru le mercredi 30 mai 2018 dans Ventilo n° 411

Un vent de liberté (autour de mai 68) à l’Institut de l’Image

Sous les pavés, l’image

 

Le cycle que l’équipe de l’Institut de l’Image consacre en juin au cinquantenaire de Mai 68 offre, par la finesse de la programmation, l’occasion de revenir non pas sur l’événement même, mais sur tous les mécanismes qui l’ont précédé et suivi.

  À l’occasion du cinquantenaire de Mai 68, il flotte dans les salles hexagonales un parfum mêlé d’histoire, de nostalgie, d’interrogations, de questionnements des luttes. Car si certains esprits chagrins s’interrogent sur la récupération d’un pan majeur de l’histoire du vingtième siècle (c’est certes parfois le cas), il semble plus que nécessaire de se questionner sur les mécanismes sociaux, politiques et culturels qui ont conduit au point d’orgue de ce joli mois de mai, et d’en définir les impacts réels imprimés dans la marche de l’histoire, jusqu’à nos jours. Le cinéma et la littérature en furent naturellement les reflets directs. Il faut lire les écrits du sociologue (et un temps situationniste) Henri Lefebvre, qui le premier s’est « intéressé au quotidien et en a montré tout à la fois la richesse cachée et les implications profondes, la dimension aliénée et aliénante et les ressorts pour l’émancipation. » L’équipe de l’Institut de l’Image d’Aix-en-Provence s’empare aujourd’hui de cette question de la représentation de l’histoire via l’image en mouvement, avec un cycle qui possède l’intelligence d’éclairer Mai 68 à travers une poignée d’œuvres ayant précédé ou suivi les événements. Une manière subtile d’user du cinématographe pour incarner Mai 68 dans un contexte beaucoup plus global. Ainsi, la programmation proposée remonte à 1933, avec l’inoxydable Zéro de conduite de Jean Vigo, qui porte en son germe toute la révolte d’une (jeune) société lassée de la rigidité institutionnelle. Parallèlement, deux autres films majeurs préfigurent aisément le souffle de contestation à venir : l’Italien Prima della rivoluzione de Bernardo Bertolucci, en 1964, et La Chinoise de Jean-Luc Godard, en 1967. Deux opus — magnifiques ! — récemment restaurés en numérique nous plongent ensuite dans les mécanismes même des événements de Mai 68 : Le Droit à la parole de Jacques Kébadian (invité pour l’occasion lors de la séance de L’Île de Mai) et Michel Andrieu, et Mai 68, la belle ouvrage de Jean-Luc Magneron. Images d’archives, témoignages, éclairages affinent les regards en contrechamp de celle exprimée dans les mass médias. La question de l’après est alors posée par le reste de la programmation, dans La Fiancée du pirate de Nelly Kaplan, qui rappelle la convergence des luttes, en l’occurrence féministes, durant cette courte période, ou Zabriskie Point de Michelangelo Antonioni, sans omettre l’excellente série en cinq épisodes de Rainer Werner Fassbinder, Huit heures ne font pas un jour. Jusqu’à la projection du film de Bertrand Bonello, Nocturama, dans lequel la question de l’intemporalité des luttes (révolte politique et rejet de la société de consommation) reste toujours si prégnante.  

Emmanuel Vigne

 
Un vent de liberté (autour de mai 68) : du 2 au 26/06 à l’Institut de l’Image (Salle Armand Lunel, Cité du Livre, 8/10 rue des Allumettes, Aix-en-Provence). Rens. : 04 42 26 81 82 / www.institut-image.org
Le programme complet du cycle « Un vent de liberté (autour de mai 68) » ici