Anouar Brahem

Les Rencontres d’Averroès #23

Côte à côte

 

Pensées par Thierry Fabre en 1994, les Rencontres d’Averroès — figure tutélaire de la transmission des savoirs entre religions — présentent cette année au Théâtre de la Criée une vingt-troisième édition remaniée, incorporant de nouveaux formats et partenaires, sur le thème « Surmonter la faille ? ».

 

Désormais produites et organisées par Des livres comme des idées, les Rencontres d’Averroès ont pour objet d’instaurer des dialogues entre les deux versants de la Méditerranée, et convient des chercheurs, philosophes, artistes ou écrivains à démêler la problématique retenue cette année : « Surmonter la faille ? ».
A l’heure où la bougie occulte le débat et la compassion cadenasse la pensée, les Rencontres d’Averroès s’essaient à l’examen diligent de situation en épluchant les causes, les dessous « généalogiques, historiques, géopolitiques et internes à la cité » des failles mouvantes qui régissent la « Méditerranée des deux rives ». Cas de conscience déverrouillé, ou quand la réconciliation reprend du galon.
Après l’annulation de la précédente édition suite aux attentats parisiens du 13 novembre, les Rencontres souhaitent récupérer la parole, endiguer l’appel de la fracture, de la cachette identitaire, et dédire ce qu’annonçait Samuel Huntington en 1993 dans Le Choc des civilisations : « Dans ce monde nouveau, les conflits les plus étendus, les plus importants et les plus dangereux n’auront pas lieu entre classes sociales, entre riches et pauvres, entre groupes définis selon des critères économiques, mais entre peuples appartenant à différentes entités culturelles. »
Un choc, donc, entre un Occident en déclin mais sûr de lui et une communauté musulmane, l’Oumma, qui « s’efforce d’étendre sa puissance militaire et économique pour résister à l’Occident et trouver un équilibre avec lui. » Il ne s’agirait donc plus d’une compétition gelée entre deux systèmes économiques forts, mais d’une confrontation marquée par le facteur cultu(r)el et multipolaire.
C’est au cœur de cette thématique controversée que les motivations et les enjeux des Rencontres d’Averroès prennent pied : sur le positionnement de Marseille — maison-mère ciblée et emblématique du brassage culturel — et plus largement de l’Europe avec la Méditerranée, de l’Europe avec l’Islam.
Pour ce faire, les Rencontres se composeront de quatre tables rondes articulées autour des « failles » susmentionnées et d’une conférence assurée par de jeunes chercheurs issus des deux rives, sous le nom de Collège de Méditerranée , qui s’interrogeront sur « Qu’est-ce que l’islam a changé à la Méditerranée ? ».
Par ailleurs, les Rencontres souhaitent redorer la place de l’artiste et son pouvoir de transmission, mais également celle de la jeunesse — victime inconditionnelle des retouches médiatiques — par la mise en place d’un partenariat avec Aix-Marseille Université. Comme le préconisait Pascal dans ses Pensées, il s’agirait de remuer le roseau dans la plèbe.
En écho à ces échanges passionnés, Radio Live proposera de reconstituer sur le plateau les éléments de décor d’une émission de radio, avec projections d’images, une musicienne en live et des dessins en direct. En somme, une émission de radio en trois dimensions.
Et pour la relâche, Anouar Brahem, célèbre oudiste et compositeur tunisien, fera l’honneur de sa présence, accompagné par trois autres musiciens pour un concert « au souffle impressionnant, oscillant entre climats dramatiques et atmosphères apaisées. » On est donc ici bien loin d’un séminaire sur la paix manœuvré par BHL et chanté par Black M.
Un petit conseil en attendant : plongez tête baissée dans la discographie de Muslimgauze, musicien britannique fortement influencé par le Moyen-Orient.

 

Les Rencontres d’Averroès #23 : du 10 au 13/11 au Théâtre de la Criée (30 quai de Rive Neuve, 7e).
Rens. : 09 72 57 41 09 / www.rencontresaverroes.com

Le programme complet des Rencontres d’Averroès ici