Le Collectif des théâtres des quartiers marseillais

Pied aux planches

 

Réunis en collectif depuis le premier déconfinement, seize théâtres de proximité marseillais lancent un SOS aux élus, qu’ils appellent à « passer aux actes » urgemment pour les sauver du marasme dans lequel les a plongés la gestion de la crise sanitaire. Et préserver ainsi leur travail essentiel de « premier vecteur de diffusion de la culture ».

 

 

C’est entre deux cours en visio que Bernard Fabrizio, du Divadlo, prend sur son temps pour nous accorder une interview. C’est la manière que le théâtre, comme d’autres, a trouvé pour garder le lien avec, à minima, ses élèves. Peut-être est-ce parmi les bons tuyaux qu’ont pu s’échanger les seize membres du Collectif des théâtres des quartiers marseillais ? Cette association, montée au début du premier déconfinement en juin, rassemble des théâtres dont le dénominateur commun est d’avoir une capacité d’accueil de moins de trois cent personnes. C’est donc tout naturellement que seize des vingt-trois salles concernées de la ville ont répondu à l’appel ; l’objectif étant, comme le rappelle Christophe Pecoraro, président de l’association et directeur de l’Archange, « d’être mieux entendus ».

C’est dans ce but que, le 6 novembre dernier, le collectif fait parvenir aux élus de la Ville et de la Métropole un appel à l’aide : une demande officielle de création d’un fonds culturel d’urgence d’une valeur de quatre millions d’euros — en fait, une estimation du soutien public nécessaire pour rester ouverts. Dans cette lettre, véritable cri du cœur, on apprend que les théâtres de quartier rassemblent chaque année près de 120 000 spectateurs et pas moins de 2000 élèves. Le texte permet de réaliser que les théâtres souffrent de six mois d’activités sans spectacles sur l’année 2020, conséquence directe des restrictions actuelles : « D’abord le couvre-feu, qui nous a obligés à tout réorganiser, et une fois que c’était fait, le coup de massue du deuxième confinement ! », déplore le collectif. Mais, même si elle est quelque part tapie dans l’ombre des salles vides, la colère n’est pas le principal déclencheur de cet appel ni de la naissance du collectif. En tout cas, elle ne semble pas l’emporter sur l’envie d’avancer.

 

Ne pas tirer le rideau

 

Christophe revient sur l’origine du collectif : « L’idée est née lors du premier confinement, en se rendant compte qu’on avait les mêmes problèmes ! »

« On ne voulait pas parler de petits théâtres, mais plutôt de théâtres de quartier, renchérit Stéphanie du Strapontin, rappelant que ces lieux-là, au-delà d’incarner la diversité, sont un véritable facilitateur pour les compagnies locales. » Et c’est bien là le problème : c’est toute une économie qui se trouve aujourd’hui extrêmement fragilisée. « De toute façon, on ne parle pas de la culture », s’attriste Christophe au lendemain du dernier discours ministériel. Au niveau local, « Nous sommes écoutés, l’échange est intéressantMais pour quels actes ? », s’interroge Bernard.

Bien sûr, rappelle Stéphanie non sans humour, « comparé aux vingt-cinq ans que nous avons traversés, nous ne pouvons que nous sentir écoutés… Il y a encore un an, on ne prenait même pas la peine d’écrire à la mairie pour demander une place de stationnement devant le théâtre pour permettre aux artistes de décharger sans écoper de contraventions. »

Malgré le risque majeur pour les théâtres, l’espoir subsiste. Alors que le collectif a rencontré la Mairie en début de semaine, les rendez-vous avec la Région et la Métropole pourraient s’avérer déterminants pour les prochaines semaines, les prochains mois. En chœur de nouveau, le collectif alerte sur la disparition irrémédiable de certaines salles si aucune aide financière n’est apportée.

Alors, dans ce marasme, il s’agit de ne pas baisser les bras. Continuer à préparer les spectacles, garder le lien avec les artistes, tenir au courant les élèves… les directeurs/trices de théâtre ont du pain sur la(les) planche(s). « N’oublions pas l’importance de notre rôle : nous sommes une première approche culturelle, un premier endroit pour découvrir », souligne Christophe.

Une idée de ce qu’en disent les « gros » théâtres ? « Pas de nouvelles de leur part », constatent à l’unisson nos trois interviewés. De l’impression de n’être pas considérés à celle de jouer en nationale face à la première division, les avis varient. C’est aussi là la force du collectif : être représentatif et porte-parole de la diversité des théâtres des quartiers marseillais. Affaire à suivre…

 

Charlotte Lazarewicz

 

Les théâtres membres du collectif et signataires de l’appel à l’aide sont :

– L’Archange Théâtre : 36 rue Negresko, 8e.
Rens. : https://www.archangetheatre.com/

– Théâtre du Strapontin : 111 rue de l’Olivier, 5e.
Rens. : https://theatrestrapontin.wixsite.com/marseille/home

– Théâtre des Chartreux : 105 avenue des Chartreux, 4e.
Rens. : http://theatredeschartreux.com/

– Divadlo Théâtre : 69 rue Sainte Cécile, 5e.
Rens. : https://www.divadlo-theatre.fr/

– Le Daki Ling : 45A rue d’Aubagne, 1er.
Rens. : http://www.dakiling.com/

– L’Art Dû : 83 rue Marengo, 6e.
Rens. : https://lartdutheatre.fr/

– Théâtre du Carré Rond : 23 rue des trois rois, 6e.
Rens. : https://lecarrerond.fr/

– Théâtre Marie Jeanne : 56 rue Berlioz, 6e.
Rens. : http://www.theatre-mariejeanne.com/

– La Divine Comédie : 2 rue Vian, 6e.
Rens. : https://divinecomedietheatre.fr/

– Théâtre du Petit Matin : 67A rue Ferrari, 5e.
Rens. : http://tpmatin.over-blog.com/

– Théâtre de la Ferronnerie : 34 rue Consolat, 1er.
Rens. : https://www.mairol-compagnie.com/la-ferronnerie

– Badaboum Théâtre : 16 quai de Rive-Neuve, 7e.
Rens. : https://www.badaboum-theatre.com/

– Théâtre de l’Œuvre : 1 rue Mission de France, 1er.
Rens. : https://theatre-oeuvre.com/

– Théâtre de la Gare : 17 avenue de Roquefavour, 15e.
Rens. : https://www.theatredelagare.com/

– L’Atelier de Mars : 44 rue du refuge, 2e.
Rens. : https://www.atelierdemars.eu/

– Le Théâtre du Têtard : 33 rue Ferrari, 5e.
Rens. : http://www.letetard.com/

La lettre de l’association : https://theatre-oeuvre.com/pour-les-theatres-passons-aux-actes/

Sur le même sujet, nous vous conseillons de lire l’interview de Christophe Pecoraro dans Marsactu :
https://marsactu.fr/comment-ca-va-les-theatres-de-quartier-depuis-mars-on-prend-une-gifle-par-semaine/