Henri Florens © Pirlouiiiit - Concertandco.com

Interview : Henri Florens

L’Interview
Henri Florens

La légende parlait d’un pianiste au swing imparable se produisant avec les plus grands (Chet, Dizzy, Roy Haynes…). Mais l’homme n’avait pas tout à fait disparu des agendas marseillais. Il se produisait bien, de-ci, de-là, dans quelque bar du Panier, en compagnie de jeunes pousses ou bien de son vieux compère Robert Petinnelli, inlassable boppeur. Or, voilà qu’Henri Florens, amateur de Chopin, sort un album solo et enchâne les dates dans la foulée.

 

Quelle est lorigine de ce nouvel album ?
J’ai eu la chance de rencontrer l’immense pianiste classique Bernard Dascoli par un ami commun. Il a proposé de m’aider. J’hallucinais : ce poète magique souhaitait m’enregistrer chez lui, à Aubagne. Ça s’est passé simplement. J’ai découvert une personne d’une qualité humaine exceptionnelle. Un peu après ça, la Mesón a proposé de me produire un disque avec le bouillonnant et inventif Niko Kant comme directeur artistique, et Cyril Pellegrin l’ingé son, qui m’a séduit par sa compétence et sa compréhension. L’enregistrement proprement dit a duré quatre heures. C’était chez Bernard, sur son piano. Le choix du solo correspondait pour moi à une prise de responsabilité totale. Je souhaitais dédier ce disque à François Chassagnite, généreux trompettiste et chanteur passionnant dont tout le monde déplorait la disparition soudaine. J’ai choisi cinq compositions, quelques clins d’œil à Art Tatum, des évocations à Bud Powell, un Duke, suggeré par Niko…

 

Pourtant, le fait de sortir un album solo ne tempêche apparemment pas dêtre friand dexpériences collectives inédites…
Il est vrai que j’adore aussi jouer en groupe. Cet été, j’ai entendu Elizabeth Caumont, son feeling m’a beaucoup touché et elle chante magnifiquement le My Funny Valentine de Chet, celui-là même où je l’accompagne. La Mesón a retenu ma proposition. Tout le monde apprécie le grand talent de Sam Favreau et Cédrick Bec, qui complètent l’orchestre. La veille, nos jouerons à l’Alcazar, sous la houlette de Patrick Casse. Le lendemain, le duo avec Marion Rampal sera un moment privilégié et éclectique : nous jouerons Marlène Dietrich, Purcell, Archie Shepp, Joni Mitchell, Gershwin, Monk et bien d’autres. Nous nous amusons beaucoup à jouer ensemble.

 

Tu aimes à te présenter comme un autodidacte… Quentends-tu par là ?
Mon père, Louis Florens, nous a élevés avec son violon et sa guitare, et lorsque j’ai entendu le jeune orchestre marseillais Clair de Lune jouer la Csárdás de Monti et Minor Swing de Django, j’ai été profondément touché par leur talent.

 

Un point de vue sur la scène jazz phocéenne ?
Tous les musiciens m’apportent quelque chose, ce qui compte, c’est ce qui se passe maintenant. Il y a une belle scène de jazz marseillaise, avec de nouveaux arrivants. Mais je doute que l’on en mesure vraiment l’importance. Sait-on l’apport économique des musiciens… et leur abnégation ? Le jazz n’est pas une musique élitiste, mais une musique live. C’est un lieu de rencontres, d’échanges. Et ça joue passionnément. Chacun amène sa pierre à l’édifice. Si tu m’interroges sur la situation des musiciens de jazz, sans vouloir être négatif, je te dirais qu’ils sont sinistrés économiquement. Réalise-t-on le temps que cela prend juste pour rendre heureux les auditeurs, ou simplement les captiver en donnant l’impression du moindre effort ? Et je ne pense pas que cela soit dû au nombre important de musiciens. Les projets affluent oui, mais ce serait plutôt la prise de conscience de l’importance vitale de l’ art dans la société qui serait en jeu.

Propose recueillis par Laurent Dussutour

L’album Missin’ Chass (La Méson Productions) est dans les bacs

Henri Florens : le 20/11 à la BMVR Alcazar (58 cours Belsunce, 1er) et les 21 et 22/11 à La Mesón (52 rue Consolat, 1er).
Rens : 04 91 50 11 61 / lameson.com

Pour en savoir plus : www.henriflorens.com

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