Aberration d’Emmanuel Eggermont © Jihye Jung

Festival Parallèle

Arts nouveaux

 

Les Parallèles se rencontrent à Marseille et Aix-en-Provence jusqu’au 1er février. Lou Colombani, directrice du festival international des pratiques artistiques émergentes, fait le point avec nous sur la programmation de cette douzième édition.

 

 

Lou Colombani a une formation de comédienne. Son projet de fin d’étude en Arts du spectacle, à Aix-en-Provence, la pousse très tôt à monter un outil de production pour répondre aux besoins des artistes en début de professionnalisation.

Ainsi naît Parallèle, un pôle de production dédié aux pratiques artistiques émergentes, qui permet aux créateurs de formuler leur projet et les aide dans leurs recherches de partenaires et de lieux de diffusion. Cette démarche s’inscrit dans une logique de compagnonnage.

Le festival, qui a lieu tous les ans en janvier, est donc une fenêtre de visibilité pour le travail produit par la plateforme Parallèle, mais pas uniquement. Sa programmation pluridisciplinaire permet de montrer les projets des jeunes générations d’artistes ainsi que l’évolution de leurs pratiques. « C’est un passeur de nouveaux langages, de nouvelles formes, en lien avec les préoccupations d’une génération à laquelle nous devons toute notre attention », explique la directrice du festival.

L’édition 2022 se déploie entre Marseille et Aix, ce qui témoigne de la volonté des deux villes de diversifier leur offre culturelle, en s’ouvrant à de nouveaux formats ou langages scéniques. Le maillage régional avec des partenaires locaux, inscrits dans des territoires différents, fait également partie des missions de Parallèle.

Cependant, ce rayonnement ne se limite pas à l’échelle locale. Le festival porte, depuis ses prémices, une dimension internationale. En invitant des artistes étrangers, la programmation permet d’élargir les horizons pour se nourrir de ce qui se fait ailleurs.

Cette année, on pourra ainsi découvrir, entre autres, le travail d’un collectif d’artistes d’Haïti, de France et du Royaume-Uni, The Living and the Dead Ensemble. The Wake (la Veillée en français), permet de faire entendre les voix, souvent étouffées, des insulaires. Il s’agit à la fois d’une chambre d’écho et d’une invitation à la mobilité pour des artistes souvent bloqués en Haïti. Ce méta-projet, comprenant une installation vidéo (à Coco Velten le 19) et une performance (au Théâtre Joliette le 25), témoigne d’un désir d’aller à la rencontre du public et de la diaspora haïtienne dans divers lieux de la ville. La performance sera également présentée aux Ateliers Médicis à Clichy-sous-Bois, au Quartz à Brest dans le cadre du Festival DansFabrik et au Festival Travelling à Rennes. L’installation vidéo  fera également partie de l’exposition du Forum Expanded à la Berlinale. Enfin, le Kunstverein de Karlsruhe accueillera de mai à juillet 2022 la première exposition monographique de The Living and the Dead Ensemble.

La « veillée » se pose justement en thématique centrale de cette nouvelle édition. On la retrouve d’ailleurs dans les œuvres sélectionnées pour l’exposition collective La Relève 4, destinée à donner de la visibilité à de jeunes artistes marseillais, dans des lieux aussi divers que la Galerie des Grands Bains Douches de la Plaine (Art-Cade), Coco Velten, Buropolis et le Château de Servières.

Le 22, ce sont les résident.e.s d’Artagon, situé dans l’ancienne usine Ricard du 14e arrondissement, qui vont investir les lieux lors d’une soirée déambulatoire, toujours autour du thème de la veillée « comme un espace de résistance, de politique, de rêverie… » En s’interrogeant sur les possibilités d’habiter une nuit, les artistes ont carte blanche pour immerger le public dans ce lieu expérimental.

Les enjeux politiques et climatiques de notre « monde en feu » se retrouvent dans la proposition de Lion’s Drums, le 26 à Montévidéo, parti à la rencontre des Kagabas, un peuple amérindien de Colombie menacé par la déforestation. Dans son live audiovisuel, l’artiste nous délivre des enregistrements de leurs chants rituels et des bruits de la nature environnante.

Toujours à Montévidéo, le même soir, sera présenté Évaporations de la jeune autrice marseillaise Camille Nauffray, qui interroge le phénomène des hikikomori, ces reclus sociaux japonais.

La proposition chorégraphique d’Emmanuel Eggermont Aberration (le 28 au Zef) se définit quant à elle comme une suite de tentatives pour recouvrer les sens comme on recouvre la vue.

Notons également les deux propositions aixoises. Au 3bisF d’abord, Raide d’Équerre de la plasticienne Pauline Brun déploie un univers inspiré par la Red Room de David Lynch dans Twin Peaks. Au Théâtre Antoine Vitez, pour clore la quinzaine festivalière, sera présenté un hommage de Maxime Cuvers au metteur en scène Yoshi Oida, un des fondateurs du Nô japonais.

 

Isabelle Rainaldi

 

 

Festival Parallèle : jusqu’au 1/02 à Marseille et Aix-en-Provence.

Rens. : https://www.plateformeparallele.com