Eric Hattan – Habiter l’inhabituel au FRAC

Eric Hattan – Habiter l’inhabituel au FRAC

Hors-champ des possibles

 

A la manière de Gabriel Orozco avec sa « discrète » boîte à chaussure, Eric Hattan surprend les visiteurs du FRAC avec un jeu de piste en trompe-l’œil.

 

Dans une exposition, Gabriel Orozco présentait une boîte à chaussure. Tandis que certains visiteurs ne la remarquaient pas, d’autres se prenaient carrément les pieds dedans. Il jouait là la carte de l’art « insignifiant », qui ne s’impose pas par sa taille ou sa technique mais par la qualité du regard qu’il demande. C’est dans cet esprit qu’Eric Hattan a construit son exposition au FRAC, misant sur ce qui n’est pas dans le champ de notre regard.
L’artiste nous invite à un jeu de piste. La liste des œuvres exposées est accrochée dans chaque salle, comme des indices de leur présence. Elles nécessitent en effet un regard plus qu’attentif.
L’entrée de l’exposition est marquée par un rideau de chambres à air, mis en lumière par un lampadaire fixé sur la rampe d’escalier de la première salle. A première vue, le bel espace paraît « vide », comme si l’artiste avait voulu exposer l’espace lui-même. Il faut s’approcher et adopter le rythme de la promenade contemplative pour que se révèlent les œuvres, de la même manière que nos yeux, plongés dans une pièce noire, doivent s’habituer à l’obscurité pour appréhender le contour des choses.
Au fond de la pièce, des seaux recueillent de l’eau. Une fuite ? Des gouttes nous font lever les yeux et révèlent la présence de rideaux de douches qui suintent dix mètres plus haut. A l’autre bout de la salle, une porte est entrouverte. Eric Hattan s’amuse du spectateur en donnant l’illusion d’une pièce attenante visible à travers le judas. Les huit piliers de la pièce semblent anodins, pourtant…
L’artiste est également collectionneur : des chaises, sur lesquelles on peut voir l’empreinte corporelle de leurs propriétaires, se racontent comme des reliques. Les objets usuels acquièrent ici une aura de sculpture, drainant avec eux une histoire et un imaginaire.
Il faut voir les indices de l’œuvre qui se camoufle. Il s’agit de déambuler dans un espace où l’évidence se dérobe à nous. L’air de rien, les œuvres s’imbriquent dans l’espace, se donnant à celui qui prend le temps de les voir.

Adèle de Keyzer

 

Eric Hattan – Habiter l’inhabituel : jusqu’au 4/05 au FRAC Provence-Alpes-Côte d’Azur (20 boulevard de Dunkerque, 2e).
Rens. 04 91 91 27 55 / www.fracpaca.org

Pour en (sa)voir plus : www.hattan.ch