On the Road (V.O.)

Cycle consacré aux œuvres hybrides picorant du côté de la poésie, de la peinture, de l’art vidéo et de l’histoire

Partir, aller sur la route, sans objectif défini, s’ouvrir au monde, le découvrir au hasard du chemin, cette utopie de la jeunesse contestatrice de la deuxième moitié du XXe siècle a laissé des œuvres artistiques majeures et a influencé profondément et durablement les générations suivantes. 

Ce mouvement venu des États-Unis, comme un désir de refaire le parcours d’est en ouest mais, à l’encontre des premiers colons venus d’Europe, non pas tracer un chemin de violence pour que le nouveau monde obéisse à un désir de conquête et de domination mais l’accueillir pacifiquement à l’intérieur de soi. 

La route est aussi un cheminement intérieur, une remise en cause historique et une contestation radicale. 

La contestation ne se limite pas à rejeter la vie conventionnelle de la génération précédente qui, au sortir de la guerre, aspire à la stabilité. Cette vie sécurisante enracinée dans le confort de la consommation naissante est aussi étouffante par sa morale bien-pensante et ses codes sociaux rigides. La jeunesse montante a une aspiration frénétique à vivre, à faire toutes les expériences possibles, intensément. La vie dans laquelle s’installent leurs parents est un contre modèle, une vie anémiée, sans relief, sans temps forts, sans rencontres palpitantes, un monde rétréci et sans saveur. 

Le voyage, l’errance est l’un des modes de vie revendiqué par cette génération qui recherche l’aventure, le hasard qui la mettrait sur sa route, l’ouverture à tous les possibles, quels qu’ils soient. La quête n’est pas de préserver mais d’épuiser sa vie dans la richesse de ses battements, lumineux ou sombres.

Écrivains, poètes, peintres, cinéastes, la quête On the Road a marqué tous les champs artistiques. Kerouac, bien sûr, à qui le titre de cette rétrospective est emprunté, Ginsberg, Buroughs, Dylan et bien d’autres. Les styles sont différents mais la marque de l’errance est là avec sa revendication d’un autre monde à vivre, à construire socialement, politiquement et esthétiquement.

Ce bouillonnement, encore si proche, a eu un tel retentissement qu’il marque nombre d’artistes contemporains.

Cette rétrospective propose, en six séances, de cheminer sur ces sentiers du bout du monde ou de derrière chez nous, éblouissants ou inquiétants, saisis délicatement ou reconstruits entièrement… et d’aller voir comment les champs artistiques se sont croisés, ont fécondé des œuvres hybrides picorant du côté de la poésie, de la peinture, de l’art vidéo et de l’histoire.

Videodrome 2
Du 31 octobre au 5 novembre 2023
Prix libre (+ adhésion annuelle : 6 €)
Rens. 04 91 42 75 41
www.videodrome2.fr
49 cours Julien
13006 Marseille
04 91 42 75 41

Article paru le mercredi 25 octobre 2023 dans Ventilo n° 489

Cycle « On the road » au Videodrome 2

Feuilles de routes

 

Grains de Lumière explore le champ cinématographique expérimental et poétique au sein de la cité phocéenne depuis plusieurs décennies, avec un niveau d’exigence toujours renouvelée. Du 31 octobre au 5 novembre, au Videodrome 2, le cycle « On the road » propose un corpus de films en route pour une quête universelle.

    À l’intérieur du paradigme de la modernité industrielle (développement des modèles de transport, en l’occurrence la voiture) s’est développé, concomitamment à l’explosion des idéaux d’une jeunesse contestatrice des années 60, un désir d’ailleurs, de départ, sans que l’on puisse en déterminer l’arrivée, une ouverture au monde exempte de conquête, où le chemin parcouru entrerait en résonnance avec une propre quête intérieure. Presque un antivoyage. L’on pense bien évidemment à l’un des ouvrages fondateurs de cette dynamique, le On the road de Jack Kerouac, mais bien au-delà à un ensemble d’œuvres, plastiques, cinématographiques, littéraires, qui ont non seulement marqué les arts de cette époque charnière, mais ont également construit un imaginaire contemporain toujours prégnant dans la création actuelle. Reprenant le titre du livre suscité, la manifestation « On the road », proposée par l’excellente structure Grains de Lumière dirigée par Mireille Laplace, investira le Videodrome 2 pour une programmation cinématographique, poétique et expérimentale des plus pertinentes. Les festivités s’ouvriront par une cinéaste, poète et autrice dont l’œuvre, à plusieurs reprises remarquée au FID, explore les interstices de nos existences, dont la caméra capte avec élégance et intelligence les moindres stigmates : avec Un faux roman sur la vie d’Arthur Rimbaud, Florence Pazzottu convoque le Californien Jack Spicer, conjuguant ses pas avec ceux — autre voyageur — du fameux poète hexagonal. Une triple quête, en y incluant celle de la réalisatrice, qui offre un film d’une éclatante beauté. Lors des journées suivantes, Grains de Lumière a éditorialisé sa proposition avec les sélections Ailleurs (avec deux films incontournables, 7 visions fugitives de Robert Cahen et Battements solaires de Patrick Bokanowski), Painting road (sept films courts, dont ceux de Robert Breer ou Kirsten Winter), Les grands espaces (le Makimono de Werner Neckes, à ne manquer nullement !), Errances mélancoliques (avec le Pictures of the Lost World de Klaus Wyborny) et Le temps, l’histoire et la mémoire, que viendra illustrer l’opus du grand Jonas Mekas Reminiscences of a Journey to Lithuania. Au final, une programmation en tous points remarquable, qui use des sentiers battus de l’image en mouvement pour réaffirmer toute sa puissance poétique.  

Emmanuel Vigne

 

Cycle « On the road » : du 31/10 au 5/11 au Videodrome 2 (49 cours Julien, 6e).

Rens. : www.videodrome2.fr

Le programme complet du cycle « On the road » ici