SansTitre de Javiera Tejerina-Risso

Calme à la Galerie du 5e

En toute quiétude

 

Pari audacieux que de proposer une exposition intitulée Calme en plein cœur des Galeries Lafayette. Du fameux triptyque baudelairien, le calme est sans doute l’un des plus difficiles à représenter. Comment le pense-t-on ? Comme l’attente, l’ennui, la mort ? A l’initiative des galeries du réseau Marseille Expos, quinze artistes répondent chacun à leur manière.

De la photographie à la sculpture, en passant par le dessin et la peinture, une série d’instants figés nous transportent dans un univers où l’habituelle cohue des lieux n’existe plus. La foule qui s’agite et s’impatiente jusqu’à la lisière de la Galerie du 5e ne fait soudain plus de bruit ; les annonces promotionnelles se transforment en un bourdonnement insensé. C’est qu’en face de nous, Timothée Talard expose Un arc-en-ciel dans la nuit. Une œuvre subtile, réalisée essentiellement avec des produits chimiques. Le calme est là. Dans notre quotidien pollué, on peut apercevoir l’univers. Sur le fond noir se détachent des couleurs, elles bougent avec nous. Le même prisme qui apparaît dans une flaque de pétrole rappelle soudain la Voie lactée. Le calme, c’est l’instant magique. L’instant qui précède ou suit le baiser (Mélanie Bellue-Schumacher). Celui que l’on rate à force de trop le voir (Nicolas Pincemin). Le calme, c’est également la force de ce que l’on ne voit pas. L’apparente tranquillité d’un visage peut cacher une tempête intérieure, comme le montre si bien le fascinant dessin d’Arnaud Vasseux. Avec sa série Le Poids du ciel, Anne-Claire Broc’h rappelle quant à elle que le calme, c’est aussi arrêter de lutter.
Du fait du lieu, un autre rapport à l’œuvre s’établit. Pour le néophyte, la curiosité prend volontiers le pas sur la gêne dès lors que l’art contemporain est délogé du sacro-saint musée pour se montrer là où il va acheter ses pulls pour l’hiver. L’instant de calme se concrétise alors. Au cœur de la frénésie consumériste se détache un espace inédit. Celui d’une pause. Prendre son temps, ne serait-ce pas aussi ça, le calme ? Avec un tel lieu de passage, qui constitue en grande partie l’originalité du projet, Marseille Expos a visé juste. Bel effort de démocratisation car côté visiteurs, c’est loin d’être le calme plat.

Morgane Masson

Calme : jusqu’au 15/12 à la Galerie du 5e (Galeries Lafayette, rue Saint Ferréol, 1er).
Rens. www.marseilleexpos.com