Zig Zag Zong

Zig Zag Zong

De passage à Marseille pour la Fiesta des Suds, le groupe réunionnais Zong dessine les contours d’une créolité moderne et festive… (lire la suite)

De passage à Marseille pour la Fiesta des Suds, le groupe réunionnais Zong dessine les contours d’une créolité moderne et festive.

Minuscule point sur le Pacifique, carrefour insulaire à la croisée de l’Afrique, de l’Asie et de l’occident colonisateur, l’île de La Réunion a longtemps été connue uniquement pour sa gastronomie épicée, son pti’ rhum efficace et ses spots de surf. Seule affirmation d’une identité culturelle forte, la langue, ce créole réunionnais d’origine française avec des apports africains, indiens et malgaches. On y décèle une influence du vieux français et du bas-normand de telle sorte qu’un habitué des patois normands pourra sans trop de peine comprendre ses interlocuteurs réunionnais. Les artistes locaux ont puisé dans cette langue métisse et colorée pour inventer une identité propre, une sorte de réunionité à l’intérieur de la grande famille créole. Ainsi, le maloya (musique percussive aux racines africaines) et le sega (romance réunionnaise, sorte de variété créole) ont longtemps été les deux mamelles d’une musique insulaire en mouvement. Puis vint jusqu’à La Réunion l’avènement des machines qui a permis à une nouvelle génération de marier l’héritage musical de l’île aux nouveaux outils de création. C’est dans cette mouvance que s’inscrit Zong qui, après dix ans d’activisme, a réellement trouvé sa formule en 2002. Drean (chant), Fever (batterie) et Costa (synthé et machines) co-écrivent tous les textes et partagent la paternité de l’ensemble des morceaux. Avec leur dernier album, Paradis Thématik[1], le groupe fait preuve d’une maturité certaine et d’un goût sûr dans ses compositions. « Sur ce disque, tout est parti des instruments acoustiques : piano, batterie et voix. Les machines sont arrivées après, on n’est pas esclaves de l’électronique. » précise Drean. Enregistré au RPStudio à Johannesbourg en Afrique du sud, essentiellement en live, l’album bénéficie d’un son chaud et roots qui reflète parfaitement l’utilisation de matériel vintage, orgues Hammond et Fender Rhodes en tête. Pour leur escale marseillaise, Zong nous affirme que « sur scène c’est autre chose, notre côté rock revient… on ne se sent pas de ressortir aux gens la même recette que sur disque ». Une affirmation confirmée par leur récente prestation live lors de l’inauguration du magasin Pardon ! : une énergie débordante, une identité visuelle forte et une musique fédératrice qui rassemblait dans le centre ville autant le public branché que des bandes de punks à chien. Drean nous éclaire : « ce côté un peu tribe et hardcore correspond à un projet que menaient seuls Costa et Fever quand j’étais enceinte. Ca s’appelait Zon (soit Zong sans son point G, charmant !) et c’était beaucoup plus musclé et instrumental. Cette énergie-là, elle ressort parfois sur scène ». Il ne faudrait pas pour autant résumer Zong à un de ces nombreux groupes à la mode dont la plaisante formule « instruments + machines » masque souvent une inspiration pauvre et une énergie vaine. Pour cela, il suffit de se pencher sur le passé musical de Costa, responsable de la production de Sankèr, le dernier album de Nathalie Natiembé sorti l’année dernière et considéré à juste titre comme un trésor « national » réunionnais, au même titre que les disques du maître Danyel Waro. C’est dans ce grand écart permanent entre la tradition et la modernité, La Réunion et la France que Zong excelle : il plaît autant aux grands-pères réunionnais et aux adolescent bien de chez nous. Les sceptiques pourront se rassurer à l’écoute de Mahavel, morceau qui ouvre l’album Paradis Thématik et qui représente à bien des égards le premier essai (réussi) d’un maloya électronique. Les curieux pourront aussi jeter une oreille aux compilations Pluriel, éditées par le Pôle Régional des Musiques Actuelles de la Réunion, qui regroupent une bonne partie de la création locale contemporaine. La Fiesta, Zong en garde un bon souvenir lors de leur précédent passage avec Interlope et Constructus Corporation. Cette fois pour la soirée de clôture, ils se frotteront de près aux marseillaiseries de Oaï Star et à l’énergie alternative des Wampas. De l’électronique créole et sensuelle à la Fiesta, c’est une des rares surprises dans une programmation 2006 peu aventureuse et une excellente occasion de se rendre aux Docks.

nas/im

Zong, le 31 octobre à la Fiesta des Suds avec Les Wampas, Oaï Star et Dj Zebra A partir de 20h – 15 euros

Notes

[1] Dans les bacs : Zong – Paradis Thématik (Sakifo/More South/Nocturne)