Vingt bougies pour Charlie au Domaine de Fontblanche

Vingt bougies pour Charlie au Domaine de Fontblanche

Vingt ans de résistance bleue

En pleine jeunesse, l’association vitrollaise Charlie Free s’engage plus que jamais dans la voie d’un jazz émancipé et revendicatif. Retour sur un parcours de luttes jazzistiques et regard apaisé vers un avenir vibrant.

Rappelons-nous : il y a une douzaine d’années, les responsables de l’association envoyaient paître les Mégret et leurs séides, au nom d’un jazz vecteur d’émancipation. Claude Gravier, président de l’association, retient surtout de ces années de maquis le travail au sein de la Coordination Associative Vitrolles-Marignane, véritable creuset d’une guérilla culturelle. Dans tous les cas, le fait d’avoir programmé plus de 300 concerts est vraiment, selon lui, un « gage d’émancipation » pour un public fidélisé, qui fait « l’effort de se déplacer pour écouter les diverses propositions presque en confiance », quand il s’agit de « faire entendre des musiciens non programmés par la majorité des médias. »
Le Charlie Jazz Festival est inauguré en tant que Fête à Charlie en 98 sous le parrainage de Siné, alors que le fascisme provençal est à son faîte. C’est pendant ces années sombres que l’asso réussit à créer deux emplois permanents au service d’une « bande de copains » bénévoles jamais menacés par la routine. En 2000, Charlie Free adhère à la Fédération des Scènes de Jazz et de Musiques Improvisées, prélude à un exigeant travail en réseau avec le Cri du Port à Marseille et l’AJMI à Avignon : par-delà les économies d’échelle autorisées dans l’organisation de tournées communes, les « convergences esthétiques doivent être réunies. »
La résistance jazzistique ne s’est pas arrêtée avec le retour de la démocratie municipale. Programmer des artistes de jazz indépendants, mener des actions pédagogiques baignant dans l’improvisation (1), présenter des expositions inédites (2)… : en plus de l’excellence de la programmation dans le doux foyer du Moulin du Domaine de Fontblanche, et sous les platanes lors du festival ou lors d’une fête de la musique revendiquant la rencontre populaire entre musiciens pros et amateurs, le Moulin à Jazz ne manque pas de grain à moudre pour les années à venir.
Loin de dédaigner le jazz néo-orléanais des origines, la programmation de fanfares lors du festival et de musiciens rendant de vibrants hommages au blues primordial (New Dreams Now, Christophe Leloil…) sonne comme un manifeste de résistance artistique.

Laurent Dussutour

Vingt bougies pour Charlie : le 6/06 au Domaine de Fontblanche (Vitrolles).
Rens. 04 42 79 63 60 / www.charliefree.com

Notes
  1. Menées actuellement par le maître vibraphoniste Bernard Jean, magnifiées par le stage sous l’égide de Louis Sclavis ce 5 juin.[]
  2. En cours, l’expo Les Nuits d’Olivier Thomas, dessins jazz originaux par un des créateurs de la BD Sans-Pitié.[]