Le Mucem par Rudy Ricciotti et Roland Carta © Cyrille Weiner / Mucem

Un musée dans la ville au Mucem

Archimed

 

Le Musée des Civilisations de l’Europe et de la Méditerranée fête ses dix ans. Une décennie durant laquelle se sont succédé des expositions mettant en lumière les cultures méditerranéennes et s’appuyant sur une collection d’un million d’objets et documents. Mais durant un week-end, c’est le bâti, son identité, que le Mucem mettra à l’honneur.

 

 

Rudy Ricciotti et Roland Carta © Rene Habermacher et Malika Mokadem

Du Mucem, on remarque instantanément ce volume iconique en résille de béton, objet d’attraction et sujets d’innombrables story. On le réduirait presque à cette construction, oubliant que dans sa forme, il est surtout le regroupement du bâtiment de Rudy Ricciotti et du Fort Saint-Jean, qui date, lui, du XVe siècle. Un lieu central devenu, par ses passerelles, le trait d’union entre trois évolutions historiques de la ville : la butte Saint-Laurent, lieu d’établissement des fondateurs de la ville, actuel Panier ; son développement autour d’un port, le Vieux-Port ; les nouveaux ports à la Joliette plus au nord — dont l’actuel J4.

Espace public avant d’être muséal, le Mucem se pratique sous différentes formes. Il paraît donc assez naturel que, pour ses dix ans, il se consacre à l’architecture, d’autant plus lors des journées nationales qui lui sont dédiées. Un week-end de rencontres, conférences, lectures, visites, performances et ateliers ouverts à tous.

 

AI : les dilemmes de l’Architecture Infinie © Stéphane Degoutin

On notera quelques curiosités le dimanche, parmi lesquelles la conférence-performance « AI : les dilemmes de l’Architecture Infinie », qui devra répondre à des questions essentielles comme « Que se passe-t-il quand on voit l’architecture depuis les selfies ? ». Tout aussi originale, cette visite commentée du bâtiment sur le thème « Secret de tournage du clip de JuL ». Tournage qui n’a jamais eu lieu, mais l’urbaniste Nicolas Memain sait mieux que quiconque invoquer les imaginaires pour raconter le bâti, initier à la contemplation et nous amener à percevoir l’imperceptible. Au même moment, Roland Carta, architecte associé du Mucem, lèvera le voile sur la face cachée de l’iceberg. L’homme (à qui l’on doit la réhabilitation du Silo) est le mieux placé pour en dévoiler les coulisses et les secrets de conception. Son illustre alter ego viendra de son côté témoigner de son expérience, la veille, lors d’une conférence.

 

Prendre soin des bâtiments © Jérôme Denis

Plus savante, la table ronde de samedi « Prendre soin des bâtiments » fera raisonner un architecte, une philosophe et un sociologue sur la nécessaire préservation des édifices : les transformer, plutôt que les détruire et ce que cela implique. Une discussion faisant écho à la récente et absurde décision de l’État de détruire le tripode de l’Insee à Malakoff pour lui substituer un nouveau bâtiment destiné aux ministères sociaux (de surface identique) ; plutôt que de le réhabiliter. Le lendemain, Corinne Vezzoni (1) complètera cette thématique lors de sa conférence « Inconstructible ? L’économie des sols » : en France, contrairement au reste du monde, la construction sur terrain vierge serait la règle en dépit des problématiques environnementales et d’imperméabilisation des sols. Il s’agit donc, pour l’architecte du Centre de Conservation et de Ressources du Mucem à la Belle de Mai, de se demander : « Et si, pour construire, il fallait donner la preuve qu’il n’y pas d’autre solution ? » Un présupposé qui ouvre la porte au réflexe de réhabilitation.

 

L’après M restaurant © Anthony Micallef

Donner la parole aux experts est essentiel pour définir les contours d’une politique urbanistique progressiste. Lui adjoindre celle des acteurs de l’auto-construction permet de décentrer le débat vers les initiatives citoyennes. Dimanche, la table ronde « Marseille Social Club » réunira des activistes de Yes We Camp, Noailles Debout et L’Après M, qui viendront partager leurs expériences et définir les possibilités d’une portabilité de leurs méthodes. Juste après, la discussion « Horizons d’hospitalité » donnera un éclairage sur les bâtisseurs de l’outil d’intervention Navire Avenir, qui vient à la rescousse des migrants traversant la Méditerranée.

 

Danse verticale par la Cie Retouramont © Olivier Héron

On en oublie, la programmation est foisonnante ! Mentionnons tout de même que les familles pourront assister au spectacle tout en apesanteur Environnement Vertical de la compagnie Retouramont et également participer à des ateliers de dessin afin de composer une fresque géante reprenant les architectures du quartier, animés par un enseignant en architecture. L’idée est de s’approprier les différentes forme de bâti qui composent le pourtour du Mucem, ce fameux trait d’union susmentionné… la boucle est bouclée.

 

 

Damien Boeuf

 

 

Un musée dans la ville : les 14 et 15/10 au Mucem (7 promenade Robert Laffont – Esplanade du J4, 2e).

Rens. : www.mucem.org

Le programme complet du temps fort « Un musée dans la ville » ici