Tomáš Džado? à la Galerie de la Friche

Tomáš Džado? à la Galerie de la Friche

Entre deux portes

Avec la grande installation Gateway, Tomáš Džado? nous projette face et à l’intérieur d’une maquette reproduisant, grandeur nature, l’entrée de son immeuble natal. Une construction qui prend corps dans une démarche questionnant la notion de passage et illustrant la mythologie personnelle du plasticien.

expo-tomas-dzadon.jpgUne architecture soviétique mise en abîme, en contreplaqué mais fort réaliste, nous happe immédiatement. Derrière le battant vitré, une simple chaise, sur laquelle est posé un press-book. Le spectateur est incité à s’immiscer plus en avant dans l’univers de Tomáš Džado? (prononcez tomache djadone), jeune artiste slovaque invité à la Friche dans le cadre des résidences croisées d’artistes contemporains menées par [S]extant et plus et Otto-Prod/La Vitrine, entre Marseille et Maribor (ville de Slovénie où la Française Claire Dantzer est simultanément accueillie).
Džado? se focalise sur l’action d’entrer au sein d’un habitat ; cet espace de transition prend évidemment une portée symbolique socio-historique particulière quand il s’agit de l’ex-Tchéquie… Ici, l’économie conceptuelle de moyens sert l’efficacité du propos : les interprétations se multiplient à l’infini comme le suggère le motif répétitif des lampes et du numéro de rue. La « petite madeleine » au vague à l’âme typiquement slave a-t-elle plutôt un goût fataliste, nostalgique ou amusé ? Montre-moi ton environnement, je te dirai qui tu es ? Comment ce citoyen praguois (qui par ailleurs restaure des cathédrales dans les Balkans) se situe-t-il entre l’effondrement du bloc communiste et la reconstruction d’un édifice dont les seconds fondements s’imbriquent dans le système capitaliste… trahissant actuellement ses limites et ses aberrations ? L’envers d’un décor quotidien ne donne pas plus de réponses, mais aiguise nos émotions. Le récit poétique de cet individu attendrissant s’accompagne d’autres mécanismes enthousiasmants : la remorque de camping recouverte de rondins de bois appelée Traditionnal caravan et son « super flat » (façade dont l’aspect change dès que le seuil en est dépassé) sont des bijoux d’humour frais et cynique. L’attachement à sa grand-mère réserve aussi de belles visions. Pour en savoir plus, n’hésitez pas à consulter le site web de l’artiste et sautez la barrière de la langue : plaisir garanti !

M. Nanquette-Querette

Tomáš Džado?. Jusqu’au 20/10 à la Galerie de la Friche de la Belle-de-Mai (41 rue Jobin, 3e). Rens. www.tomasdzadon.com / www.sextantetplus.org / www.la-vitrine.eu