Philippe, le boss de la Machine à Coudre, nous a quitté dans la nuit de jeudi à vendredi dernier. Depuis plus de dix ans, la salle qu’il animait avec Claire avait acquis une âme unique. Et c’est sûrement par sa faute que vous recevez chaque semaine notre newsletter[1], car c’est là-bas que je me suis découvert une relation particulière à la musique. Ce lieu qui fut (et reste) ma deuxième maison depuis mon installation à Noailles… Il fallait quand même être fou pour ouvrir une salle dans ce quartier que beaucoup évitent consciencieusement. Mais Philippe n’en avait cure… Pendant des années, avec Claire, ils ont porté ce lieu, underground, alternatif s’il faut des étiquettes, où l’on pouvait aussi bien écouter du flamenco (le vrai, le gitan, avec Antonio Negro) que du jazzcore (avec les Sabot qui reviennent chaque année d’Europe de l’Est) en passant par les bricolages de Scott Taylor qui nous envoutait avec son accordéon, sa trompette et son piano pour enfant. Salle incontournable aussi pour la scène punk-rock, même quand on ne parlait pas encore de renouveau rock dans la presse, même au creux de la vague, où nous étions parfois à peine une vingtaine à un concert. Et si cette scène a une telle vitalité aujourd’hui (les associations Relax-o-matic, Chavana, Lollipop & co), c’est bien grâce à la Machine… Si je dois garder une image, un souvenir partagé avec Philippe, ce fut ce concert de Servo à la Maison Hantée pour une Fête de la Musique : on s’est retrouvés devant, ivres de musique, et on est tombés dans les bras l’un de l’autre à la fin du set, hébétés par la claque prise ce soir-là. Depuis que Philippe était en retrait pour cause de maladie, Claire, épaulée par le fidèle J2P, portait la Machine. Celle-ci n’a pas perdu son âme, bien au contraire, et demeure un lieu incontournable sur Marseille. Le meilleur hommage que l’on puisse rendre à Philippe est de continuer à s’y rendre, pour que cette salle vive.