© Yannick Martin

Studio Wha-t (Yannick Martin) chez Oh! Mirettes

Outsider

 

L’artiste Yannick Martin, aka Wha-t, s’expose à partir du 3 mai chez Oh! Mirettes. L’occasion de découvrir une peinture qui interroge l’architecture et la fresque à travers des jeux de grilles ludiques.

 

Comment aborder la question de la peinture en dehors des cimaises de la galerie et du musée ? L’acte de peindre est à prendre dans son entièreté : je recouvre un plafond, une toile tendue, un mur, le détour d’une porte. L’un dans l’autre, il est question des outils, du nuancier, d’une harmonie ou d’une dissonance des couleurs, de l’espoir d’une lumière qui renaît sous la blancheur retrouvée d’un plafond. Comment distinguer la peinture d’un chantier de celle d’un auteur ? Si certains artistes se sont amusés à brouiller les pistes dans un refus de toute dramaturgie (Peter Vermeesch), on peut toutefois aborder la question du modèle comme un point de rupture. Il y a le modèle d’une peinture figurative qui dessine un monde en perspective (la Renaissance) ou réinventé (la figuration libre). Mais il existe aussi un modèle anonyme qui s’approprie les formes les plus simples, celles que nous ne remarquons plus, les rayures (Buren), les lignes brisées (Franck Stella), le gabarit d’une bande verticale (Barnett Newman). La surface devient un jeu de répétitions et d’agencement propre à créer des grilles (des patterns) qui se reproduisent à l’infini. Les formats deviennent gigantesques, dépassant les limites du simple mur d’un salon et font voler en éclats la peinture de chevalet. Dès lors, la peinture se rêve à l’extérieur et joue le jeu de la commande, investissant les friches, les façades, les préaux, les couloirs, les tunnels. L’artiste qui vit dehors (le graffeur) croise l’artiste institutionnel et les genres se confondent inexorablement pour raconter le drame d’une génération (Keith Haring et le VIH). Chez Jean Michel Basquiat, la nécessité de peindre du homeless créée une attention du regard et un storytelling propre à stimuler l’intérêt du collectionneur, ou comment se réapproprier ce qui n’est pas démontable et transposable (le mur de briques). Yannick Martin travaille sur la trame du cube dans un une perspective cavalière qui génère cinq cents variations possibles et autant de dessins. À partir de cette trame, il convoque des ateliers de recherche graphique où chacun transpose sa curiosité et ses désirs en démontant la rigidité du pattern pour créer un langage de signes. En recouvrant les murs du MTP Kleber dans le quartier de Saint Mauront, l’architecture absente devient une entité remarquable et le signe de ralliement d’une communauté comme un territoire partagé. L’esthétique relationnelle revendique la rencontre de l’autre et atomise l’image de l’artiste dans le secret de son atelier. Parce qu’il n’y a plus rien à cacher, il est possible de dire « je » à la face du monde et ce quelle que soit la saison.

 

Karim Grandi-Baupain

 

Studio Wha-t (Yannick Martin) & David Vanadia : du 3/05 au 2/07 chez Oh! Mirettes (19 rue des trois rois, 6e).

Rens. : https://ohmirettes.fr

Pour en (sa)voir plus : www.wha-t.com