S T I L de Christian Ubl © Jean Barak

Retour sur Stil de Christian Ubl au Pavillon Noir (Aix-en-Provence)

Effet de Stil 

 

Avec Stil, le chorégraphe Christian Ubl nous transporte à Vienne en Autriche, son pays natal, pour nous y faire découvrir l’histoire de l’art, les maîtres de la capitale autrichienne et nous questionner sur la liberté du corps et de l’esprit.

 

Christian Ubl a le don du panachage magistral. Il sait mixer les styles, les époques, les plastiques. Il combine à la perfection la peinture et la danse, l’ancien et le moderne et, par-dessus, tout le chatoyant de Gustav Klimt et le dramatique d’Egon Schiele. Sa pièce pour six danseurs et deux musiciens est une véritable œuvre étonnante, envoutante et singulière qui semble être née d’une collaboration entre Ubl et les deux grands peintres autrichiens. La cohabitation n’est pas anodine. Les deux maîtres de la peinture ont pour point commun, outre le fait d’être admirés par Christian Ubl, d’être des figures de la Sécession Viennoise, mouvement artistique autrichien rattaché — par convention — à son homologue allemand le Jugendstil (Art Nouveau). Klimt et Schiele ont, en effet, été des instigateurs et inspirateurs dans ce grand tournant esthétique, chacun ayant ses propres caractéristiques bien distinctes. Et c’est ce que l’on retrouve dans la pièce de Ubl : les costumes moirés et dorés qui rappellent sans équivoque les tableaux de Klimt, et les visages marquants et torturés de Schiele. Ce dernier a d’ailleurs été un disciple de Klimt à l’époque, reprenant ses thématiques pour ses propres œuvres. Le tout est parfaitement retranscrit dans Stil, œuvre dansée et véritable ode à la libération de l’esprit et du corps.

Les six danseurs, trois hommes, trois femmes, tantôt vêtus, tantôt dévêtus, poussent les spectateurs dans leurs retranchements. Entre les enchevêtrements de corps et les déformations des visages, on ne sait plus où commencent ni où se finissent les tabous. Le corps, l’érotisme, l’art… quelles sont les frontières ? Et là est la prouesse du chorégraphe viennois, qui parvient à s’approprier les codes de la fin du 19e siècle pour les réactualiser dans une pièce résolument moderne. Ainsi, on passe d’une époque à l’autre, entre ancien et modernisme, ne sachant plus où se placer dans la frise temporelle, tant les concepts évoqués semblent immortels.

La musique de la pièce se révèle en outre extraordinaire, à la fois entêtante et poétique. Elle joue elle aussi un grand rôle au même titre que les interprètes danseurs. Christian Ubl a su jouer avec la transversalité des disciplines en mélangeant les emplois entre danseurs et musiciens : ne harpiste qui chante, des danseurs qui déclament des poèmes, pour un effet détonnant. Un spectacle artistique dans tous les sens du terme, qui ne manque pas de marquer les esprits.

 

Astrid Börner

 

Stil de Christian Ubl était présenté les 3 et 4/03 au Pavillon Noir à Aix-en-Provence.

Pour en (sa)voir plus : cubehaus.fr

 

 

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