Parallèle 10 - DUCTUS MIDI d'Anne Lise Le Gac © Margaux Vendassi et François Ségallou pour Parallèle
Ductus Midi d'Anne Lise Le Gac et Arthur Chambry © Margaux Vendassi et François Ségallou / Parallèle

Retour sur le Festival Parallèle 10

Ma story

 

Le Festival Parallèle a clos en beauté sa dixième édition au Ballet National de Marseille. Retour sur une semaine de programmation éclectique où le public a répondu présent.

 

Avec Save the last dance for me, le chorégraphe italien Alessandro Sciarroni interroge le patrimoine et la question de sa représentation dans l’espace d’aujourd’hui. La danse se dilue et rebondit d’une époque vers une autre dans un continuum ininterrompu. Deux hommes se tiennent fermement et entament une ronde où l’énergie cinétique devient le centre du partage. Alessandro Sciarroni redonne vie à la polka chinata, aujourd’hui oubliée, dans un duo où la célérité des petits pas traduit toute la difficulté de son interprétation. En deuxième partie, Happiness est une pièce de transmission avec le corps de ballet du BNM. Là aussi, il est beaucoup question d’un dessin qui s’accomplit à même le sol dans un jeu de rondes où chaque danseur accomplit une séquence en décalé avec son voisin. Ici, rien ne se touche et tout se tient. Le beat lancinant feutre l’espace jusqu’à l’habiter franchement et provoque une transe où tout s’accélère et se confond dans les cris d’une jeunesse insouciante. Chez Maud Blandel, il est aussi question d’une transe où la soliste s’attèle à une gestuelle minimaliste et répétitive sur les Divertimenti de Mozart. Le trio du corps musical (guitare, tuba, piano) déroule sa partition dans un espace ouaté proche de l’orchestre de chambre. L’intimité de la représentation se prête à la présence d’un être détaché de toute contingence qui circule librement. Ici, il n’y pas de leader, on écoute librement sans regarder et l’on regarde sans écouter. Tout se décide dans une conviction personnelle où l’on effleure les choses sans les appuyer, dans le déroulé d’une partition à l’interprétation impeccable.

Ductus Midi d’Anne Lise Le Gac est très certainement l’une des plus belles surprises de ce festival. Dans un déroulé proche de l’insolence et d’un charisme sans égal, Anne Lise Le Gac et Arthur Chambry nous emmènent sur le chemin de rencontres et d’expériences déroutantes, là où le corps prend le temps de s’assoupir pour nous conter dans le flow d’un RnB ou comment nous nous sommes rencontrés. Au détour d’une colline, le petit homme se met à siffler le ruissellement des oiseaux. Un dialogue s’installe avec cette femme évanescente et perdue à la recherche d’un partenaire de jeu. Ductus Midi est un livre ouvert sur la flânerie, le rêve éveillé et l’expression de désirs enfouis. L’accessoire se construit sur scène dans le déroulé de la représentation, emmenant le théâtre vers une expérience incertaine où tout repose sur la présence de l’interprète. La story d’Anne Lise Le Gac, c’est le talent de son expression, sa joie de vivre, l’ivresse de ses rencontres et l’incertitude du lendemain.

 

Karim Grandi-Baupain

 

Le Festival Parallèle était présenté du 24 janvier au 1er février à Marseille.