Electron libre

De La Motte à Marseille, itinéraire d’un producteur gâté.

Au moment où l’hexagone semble enfin reconnaître les enfants du rock marseillais (du moins en partie), le cheminement musical de Del’Amott a de quoi surprendre. Biberonné aux Pink Floyd, fleuron du label pop Chroniques sonores (qui a notamment révélé Kid Francescoli au début des années 2000), auteur de deux albums aux antipodes du dancefloor, le voilà aujourd’hui totalement immergé dans le bain électro. Un style dans lequel il se sent comme un poisson dans l’eau, même s’il qualifie sa musique de « pop pour Dj ». Il faut dire que son histoire d’amour avec les machines ne date pas d’hier. Car en dépit de ses influences, qui auraient dû le conduire à s’adonner au rock en groupe, Tom fait ses débuts dans la musique en solitaire, derrière des platines. Il a alors seize ans, vit dans le Var et s’apprête à intégrer une fac… d’odontologie. Des études qui le mèneront à travailler pendant sept ans dans un labo dentaire.
A l’aube des années 2000, il change radicalement de trajectoire et débarque à Marseille pour y entreprendre une formation en ingénierie sonore. C’est là qu’il rencontre la petite bande des Chroniques sonores, à commencer par le boss du label, Nicolas Langlade, qui l’intègre à sa propre formation, Nicholson, avec laquelle il tournera pendant deux ans aux machines. Il se lance alors dans l’écriture, compose un premier album, Rue Breteuil, repéré par le Lab des Inrocks, puis un deuxième, Hétéro Culte, vanté dans ces colonnes. Des disques taillés pour la scène, oscillant entre rythmiques lancinantes et guitares rock, marqués par son timbre de voix tout en profondeur. Mais la réalité économique de l’industrie phonographique a tôt fait de décevoir ses velléités scéniques : trouver des dates de concert avec six cachets à assurer pour financer des albums relève de la gageure. Or, Tom ne s’imagine pas une seule seconde trouver un job alimentaire pour s’adonner à sa passion « à côté… Ma vie, c’est la musique ; mon but, c’est d’en vivre. » Ce que lui permet justement son travail d’ingénieur du son (« autrement dit, des maths ! », explique-t-il en riant). Et alors que le groupe, rattrapé par les aléas de la vie, s’essouffle peu à peu, Tom est déjà plus ou moins ailleurs, partageant désormais ses platines avec sa compagne à la ville, Eve. Pendant près de deux ans, le duo de Dj’s va faire danser les noctambules aux quatre coins de la ville, avant de se séparer, dans tous les sens du terme.
Il est temps pour Tom de faire à nouveau table rase. En janvier 2013, il se lance en solo, pour de bon, et change de nom, histoire de marquer le coup. Ce sera Del’Amott, un clin d’œil à sa ville natale, La Motte. Le changement se montrera bénéfique à plus d’un sujet : producteur et Dj comblé, Tom est aussi l’heureux père d’un petit Joshua depuis mars dernier.
S’il confesse n’écouter de l’électro que pour monter ses sets (« A la maison, j’écoute FIP ! »), notre homme se montre pourtant très prolifique dans ce domaine, produisant plus d’un morceau par mois. Son électro se veut « sans étiquette mais pas “figée” », un peu influencée rock (surtout depuis qu’il s’est adjoint les services de la chanteuse ouzbèke Munisa), mais résolument tournée vers le dancefloor. Empruntant aussi bien des chemins discoïdes que les sentiers hypnotiques de la minimale, on la qualifiera donc d’inclassable, bien que l’adjectif soit galvaudé. Inclassable, comme sa collaboration avec le peintre « à paillettes » Frank Aslan, dont il réalise l’habillage sonore de la prochaine exposition. Gageons que ce n’est là que le début d’une nouvelle aventure pour Tom, qui a façonné sa vie au gré de ses envies, quitte à tout recommencer pour se réinventer.

CC

Dj sets :

• le 22/05 à Mund Art (72 rue de la Joliette, 2^e), after work promo proposé par l’UDCM, dans le cadre de l’exposition de Frank Aslan. Rens. 06 73 80 57 97

• le 14/06 à l’Espace Mistral (L’Estaque, 16^e), dans le cadre des Rendez-vous du Kiosque.
  Rens. 06 84 52 99 15 / www.rendezvousdukiosque.fr

Pour en savoir plus : del-amott.com / soundcloud.com/del-amott/