Only God Forgives (France-Danemark – 1h30) de Nicolas Winding Refn avec Ryan Gosling, Kristin Scott Thomas, Vithaya Pansringarm…

Mes mains ont la parole

 

Bienvenue à Bangkok. Ses clubs de boxe thaïlandaise, ses prostituées, et sa justice locale sans procès vous laisseront sans voix comme le taiseux Julian (Ryan Gosling), ou plutôt sans main si vous vous écartez de la loi. Car le sabre de Chang (Vithaya Pansringam), mystérieux policier à la retraite aimant pousser la chansonnette face à ses collègues, ne vous ratera pas. Le club de boxe thaïlandaise que dirige Julian avec son frère Billy est la face émergée d’un iceberg qui cache un empire de la drogue géré par leur mère Crystal (Kristin Scott Thomas). Il suffira que Billy cède à ses penchants violents pour les prostituées mineures pour qu’une escalade d’actes vengeurs se mette en place. Nicolas Winding Refn étire la recette de Drive à la première vitesse, en poussant à son paroxysme l’écart entre un esthétisme coloré de rouge que ne renierait pas Wong Kar Waï et une violence à la limite du gore. Il est pourtant bien connu que l’on ne sert pas le même plat au déjeuner et au dîner. Il est certes intéressant de voir un apparent méchant se révéler en vrai justicier (Chang) et un supposé héros malgré lui chercher à venger l’impardonnable (Julian). Le rôle annonciateur des mouvements de caméra ne cadrant ou n’éclairant que certains membres (visages, mains) amenés à être abîmés, voire coupés, s’avère également une bonne trouvaille. La parole se fait ainsi rare, le langage du corps prenant le relais. Chang se prend pour Dieu et sa main sanctionne plus qu’elle ne pardonne. Mais trop de ralentis tuent le ralenti, et les poses contemplatives des protagonistes deviennent peu à peu lassantes. Only God Forgives reste un film aux personnages charismatiques baignant dans une atmosphère effectivement unique, mais cela semble insuffisant…

Guillaume Arias