L’exposition exposée à la Galerie de la Friche la Belle de Mai

L’exposition exposée à la Galerie de la Friche la Belle de Mai

Belle (dé)monstration

Exposer, c’est montrer. Et lorsque L’exposition est exposée, ce processus apparaît comme déjà opérant à même la création d’objets artistiques : il n’est pas seulement un enjeu des galeries et des musées, mais bien de la création elle-même. Car il participe, de façon variable, oscillant entre émancipation et conditionnement, à notre expérience de l’art.

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La relation que nous entretenons avec une œuvre n’est jamais un face-à-face dépouillé, lié seulement à la structure de l’œuvre et à la personnalité du sujet. Elle est pétrie par un ensemble de facteurs matériels, culturels, historiques et institutionnels qui guident et orientent notre perception et notre compréhension de l’art… Pour le meilleur et pour le pire. En effet, si les codes de présentation des œuvres dans un espace d’exposition répondent avant tout à la volonté de les rendre accessibles et visibles pour qu’elles puissent exister en tant que telles, ils peuvent aussi cadrer, limiter, formater notre rapport à l’art. La vidéo d’Andrea Fraser interroge avec humour les dispositifs des institutions muséales qui tendent souvent à accentuer l’idée d’une supériorité culturelle de l’art, ce qui leur permet de légitimer le pouvoir qu’elles exercent en nous disant comment et quoi regarder mais aussi quelles émotions ressentir. L’artiste, filmée en caméra cachée, incarne une visiteuse du musée Guggenheim de Bilbao et réagit à outrance aux injonctions d’une voix entendue par un audioguide, la perception esthétique étant ainsi réduite à de pures stimulations agréables, éphémères et compensatrices. Ainsi, cette vidéo dénonce aussi les liens entre expérience de l’art, marketing et fétichisation, réduisant ladite expérience à sa consommation effrénée. La dizaine d’œuvres présentées ici participent ensemble à une déconstruction des multiples facteurs qui orientent notre expérience de l’art, en montrant à quel point ils en sont parties prenantes, tout en nous donnant les moyens de les réorganiser plus librement en replaçant les œuvres non pas seulement dans le contexte de l’art mais dans le contexte humain de la création et de ses effets sur nos expériences plus quotidiennes.

Texte : Elodie Guida
Photo : Towards a Quaker View of Sex de Jérôme Allavena et Nicolas Muller et White Cube ou un monde idéel par la fenêtre de Neven Allanic

L’exposition exposée : jusqu’au 16/10 à la Galerie de la Friche la Belle de Mai (41 rue Jobin, 3e). Rens. 04 95 04 95 01 / www.asterides.org