Les RISC – Rencontres internationales Sciences et Cinéma 2011

Les RISC – Rencontres internationales Sciences et Cinéma 2011

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La science dérive

L’équipe de Polly Maggoo investit la très belle salle de la Maison de la Région pour proposer la cinquième édition des Rencontres Internationales Sciences et Cinéma. Petit tour d’horizon.

Depuis cinq éditions, Polly Maggoo explore la rencontre d’un autre type entre deux disciplines, qui trouvent leur origine à la même source. Né sous les mains inspirées de scientifiques de tout poil, le cinéma, en devenant le divertissement universel que l’on connaît, a oublié l’une de ses fonctions premières : interroger le vivant, offrir une reproduction projetée de ce que l’œil observe, sans parfois le voir. Avant de devenir spectacle, le cinéma avait déjà inventé son langage par le biais des scientifiques, comme en témoignent les travaux d’Eadweard Muybridge ou Etienne-Jules Marey. Il était donc tout naturel qu’un évènement interroge tous les points de convergence existant entre cinéphile et chercheur. L’un des axes de cette nouvelle programmation est de toucher du doigt la condition de l’homme mortel. Ou comment se dessinent toutes les réactions comportementales face à la disparition pure et simple de notre existence. La croisée des chemins entre expression artistique de la mort et cheminement scientifique se révèle alors passionnante, jamais rébarbative, ni sordide. En laissant à la maladie une place non négligeable dans cette édition, l’équipe de Polly Maggoo prend le risque de développer un thème souvent tabou dans le domaine de l’image. Les finesses d’approche ne manquent pas, pourtant, comme dans les très beaux films de Sophie-Charlotte Gautier et Anne Loubet (La java bleue, sur Alzheimer), d’Hervé Nisic (Correspondances) ou d’Emmanuel Finkiel (Je suis, histoire d’un AVC). De maladie et de mort, il en est aussi question dans le chef-d’œuvre de Peter Watkins, La bombe, brûlot anti-nucléaire de 1965, dont la relecture résonne évidemment avec l’actualité. Le cinéaste décrit avec une froideur toute démonstrative les conséquences d’un combat nucléaire sur la population, usant du docu-fiction pour mieux pénétrer l’abomination de cette apocalypse. L’atome est également au cœur du film de Benoît Bourreau, Le chant des particules, qui revient sur les travaux vertigineux des accélérateurs de particules, destinés à percer l’origine de l’univers. Mais c’est dans le champ de l’image, aux frontières de l’expérimental, que le cinéma scientifique atteint une forme inédite de poésie, à l’instar de Parallax d’Inger Lise Hansen, qui se joue de la gravité au moyen d’une caméra 16mm, pour offrir une technique d’animation à la puissance onirique inouïe. Car la perception des sens est une interrogation dans les deux disciplines, comme en témoigne le film de Sabine Bally, sur Albert Hofmann, le père du LSD, décédé voilà trois ans. Au total, plus d’une trentaine de films venant nous rappeler les définitions même de la poésie scientifique.

Texte : Emmanuel Vigne
Photo : La java bleue de Sophie-Charlotte Gautier et Anne Loubet

Les RISC – Rencontres internationales Sciences et Cinéma : jusqu’au 27/11 à la Maison de la Région (31 La Canebière, 1er).
Rens. 04 91 91 45 49 / www.pollymaggoo.org