Les Rencontres à l’Echelle étaient présentées aux Bancs Publics

Les Rencontres à l’Echelle étaient présentées aux Bancs Publics

A l’échelle des nations humaines

Fortes des soutiens énergiques qui les ont entourées, les Rencontres à l’Echelle ont été heureuses. Dans la nuée de propositions qui ponctuaient la quinzaine écoulée, trois, certes inégales, ont retenu notre attention.

Performance collective orchestrée par le doux dingue Nicolas Gerber, Un lare dans un laboratoire est sans aucun doute la proposition qui aura le plus nourri notre curiosité. Utilisant aussi bien la spatialisation sonore que des ressorts plus dramatiques, « l’œuvre-acte » fait osciller l’auditoire entre observation directe et contemplation absorbée, comme en témoignent les postures adoptées par les spectateurs, pour le moins (d)étendus. Témoins imaginaires ou non d’une expérience plus ou moins aboutie de rencontre avec la musique algérienne, les sons, les mots et les voix nous emmènent de l’autre côté de la rive, dans un ailleurs presque familier mais résolument inconnu.
Le même soir, le projet chorégraphique de Balkis Moutashar, Lautreétranger, ne s’est hélas pas révélé à la hauteur de son concept : montrer la rencontre de l’étranger, de l’Autre, dans le jeu. Malgré la relative qualité d’interprétation des jeunes artistes, ce jeu de composition instantanée masque l’aspect ludique au fondement du projet et nous plonge même dans un ennui cotonneux. Close sur elle-même, la dynamique ébauchée se divise en couples d’interprètes qui se font et se défont, sans que l’on ressente une émotion. Le pari était certes risqué ; reste que, dans l’art, le concept ne fait pas tout et que c’est bien la forme, articulée au sens, qui aurait dû nous toucher.
Plus expérimentés, les artistes du projet De mon hublot utérin, je te salue humanité et te dis bla bla bla se rencontrent, ou plutôt se côtoient comme des spectres errant en haute mer. Sur ce texte écrit par Mustapha Benfodil, tout en métaphores filées intelligemment teintées de cynisme, un collectif marseillo-algérois s’est improvisé. Remarquable feu follet, Thierry Niang, ici illustrateur dansant, se lance dans des improvisations qui font sens, tandis qu’une mère (la touchante Jacqueline Pignon) parle à son fils disparu, ressuscité par l’interprétation du comédien algérien Samir El Hakim, véritable virtuose de l’amertume. S’il n’en était qu’à ses premières heures, le projet promet un heureux avènement que nous espérons avoir l’occasion d’applaudir l’an prochain. Une clôture décidément bien fertile pour ces Rencontres à l’Echelle qui montent, qui montent…

Joanna Selvidès

Les Rencontres à l’Echelle étaient présentées du 5 au 22/11 aux Bancs Publics et dans d’autres lieux de la ville, et se poursuivent jusqu’au 6/12 avec l’exposition de Pierre Bourdieu au Mucem