Les Nouveaux Collectionneurs

Les Nouveaux Collectionneurs

Collecto ergo sum

Initiée par des structures éclairées et mise en place grâce à l’appui du Conseil Général, l’expérience des « Nouveaux Collectionneurs » réalise le pari hardi mais judicieux de faire grandir des adolescents… par le biais de l’art contemporain !

expo-nouveaux-collectionneu.jpg

Le principe est simple : offrir à des adolescents — soigneusement encadrés par des opérateurs avertis : Bureau des Compétences et des Désirs, Sextant et plus, Art-O-Rama — la chance d’approcher des œuvres contemporaines « en vrai », d’en disséquer la portée en en parlant directement avec les artistes et en se concertant sur les thématiques à faire émerger. Puis leur octroyer une enveloppe de 10 000 € (par établissement) pour réaliser un ensemble cohérent d’acquisitions dont ils feront profiter leurs pairs. Ce travail est récompensé par le plus beau des discours quand certains clament « cette aventure nous a rendus meilleurs » !
Cédric Ponti, entre autres plasticiens prometteurs, a provoqué la sensibilité des collégiens en déclinant une série d’installations basées sur le jeu de l’attirance et de la répulsion : des pédophiles notoires, dont les portraits sont réalisés à l’aide de bonbons juxtaposés, accompagnés de distributeurs des mêmes sucreries, les ont piégés. Désigné dans plusieurs collections à valider, Ponti regrette son caractère limitatif (cette expérience souffle brillamment ses deux bougies et pourrait se réitérer en plus grand nombre…), mais souligne l’intérêt d’une démarche qui « transforme ainsi les jeunes en acteurs responsables et les oblige à réfléchir sur la pertinence de leurs choix. En les confrontant à une décision unanime, cela les prépare à leurs futures vies de citoyens mais aussi d’adultes où ils seront amenés, d’une part à faire des choix, de l’autre, à accepter ceux de la collectivité. »
Outre l’aspect collectif, les élèves ont été poussés, hors des sentiers rebattus par le scolaire, à progresser individuellement : regard et sens critique, réactivité et prise de position, esprit d’analyse, de synthèse et, bien entendu, maîtrise de la langue furent sollicités sans relâche tout au long de l’année à travers un prisme inhabituel. Les médiateurs, enseignants et personnels qui ont porté ce beau challenge ne contrediront pas Rousseau qui désignait ainsi la plus utile règle de l’éducation : « Ce n’est pas de gagner du temps, c’est d’en perdre. »
Devant la réussite de ce projet innovant, soutenu par des chefs d’établissement courageux qui ont dû souvent faire face à une logistique complexe (sorties répétitives et cours à rattraper…), les autorités compétentes se doivent d’encourager ce type de manifestations qui prônent l’intelligence et l’autonomie. Les vernissages se dérouleront début juin dans les trois collèges participants et prendront une ampleur plus visible dans le cadre de Marseille 2013 pour laquelle « Les Nouveaux Collectionneurs » seront conviés à présenter la totalité des préférences désormais comprises dans ce fonds départemental. La culture à l’école tend aussi à défricher les champs qui permettent des carrefours entre le monde réel et celui de l’enseignement : les arts plastiques en sont un des piliers.

Texte : Marika Nanquette-Querette
Photo : Aure?lie Mali

Ont participé à l’expérimentation « Les Nouveaux Collectionneurs », les collèges Fraissinet et Darius Milhaud de Marseille, Les Prêcheurs d’Aix : vernissages les 8, 9 et 10, sur invitations. Rens. bureau.c.d@wanadoo.fr