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Les Enfants de la Plaine : le CD de soutien aux habitants de Noailles, de la Plaine et à la Machine

Il était une fois la Plaine…

 

Face à la perspective d’une nouvelle cartographie du quartier de la Plaine, la résistance s’organise. Entre concerts de soutien aux victimes de la rue d’Aubagne ou à la Machine à Coudre, les rockers se mobilisent.

 

C’est à la suite de l’abattage des arbres de la place Jean Jaurès le 16 octobre dernier que germe l’idée de graver dans le marbre tout ce que le quartier compte de groupes et de formations estampillés rock’n’roll. Julian Creeps, musicien et ingé son, initiateur du projet, précise : « C’est quelque chose qui est né en réaction à la manière dont le processus de rénovation s’est déroulé, à savoir sans réelle concertation et de manière extrêmement brutale. » En effet : des pelleteuses et des grues sur la plus grande place publique marseillaise, des tilleuls déracinés charriés sous escorte policière, des habitants ulcérés par un projet de rénovation qui s’apparente davantage à une requalification. Avec dans le viseur, la mutation de la Plaine en une séduisante et rutilante attraction touristique.
Brutalité et violence vont, malheureusement, aller crescendo avec l’édification d’une ceinture de béton de 2,5 mètres de haut autour de la place, puis le tragique effondrement de deux immeubles rue d’Aubagne, entraînant la mort de huit personnes.

Loin du guitariste de Drive Simone l’idée de faire de la politique : « On réagit avec les moyens qu’on a. Nous, notre moyen c’est la musique. » La compil’ baptisée Les Enfants de la Plaine se veut un hommage aux différentes générations qui y ont usé leur cuir depuis les années 80. Des pionniers tels que feu Phil Spectrum de Leda Atomica, l’un des premiers à avoir inscrit Marseille sur la carte du rock, à la génération des Conger ! Conger !, 25 et autres Catalogue. Mais c’est également un acte de résistance. Ces Enfants de la Plaine sont aussi des enfants du rock qui ont fourbi leurs armes dans les lieux emblématiques que sont la Maison Hantée, l’Intermédiaire, le Balthazar, désormais le Molotov, et la Machine à Coudre.
La petite salle de la rue Jean Roque, qui a vu défiler la crème de la crème de la scène rock indépendante, d’ici et d’ailleurs, pendant plus de deux décennies, certains n’hésitant pas à la comparer au mythique CBGB, est désormais fermée, victime collatérale de la catastrophe de Noailles. Et les perspectives de réouverture sont quasi nulles. Un coup de massue pour le duo historique (composé de Claire et J2P) qui a porté à bout de bras des propositions musicales hors des sentiers battus sans autre ressort, il faut bien le dire, que la passion chevillée au corps. Une trentaine de groupes ont répondu présent à l’appel du rocker. Tous se retrouveront à la Maison Hantée le 15 décembre pour fêter la sortie du CD et les fonds récoltés seront reversés aux associations de soutien aux habitants de Noailles, de la Plaine et à la Machine.

On dit parfois que du chaos émergent des changements salutaires. Dans un morceau qui a fait les beaux jours des récentes manifs, le chanteur polyphonique occitan Manu Théron lance : « Touchez pas à la Plaine, touchez pas. Elle est à tous et à tous restera. Si elle change ne vous en faites pas, c’est le peuple qui la transformera. » Avis aux intéressés.

Emma Zucchi