Les Bottes à Nique © Eddy Tournier

Retour sur Les Bottes à Nique par le Théâtre 27

Dubuffet léger

 

Données pour la première fois dans leur version intégrale au Merlan, Les Bottes à Nique, variations théâtrales et expérimentales sur un texte de Jean Dubuffet, se cherchent encore.

 

Des quatre propositions formant ces Bottes à Nique, une seule se détache et nous fait parvenir le sens du jargon poético-horticole de Dubuffet.
Fo dlo, la variation numéro un imaginée par Francis Ruggirello et portée à la scène par ce dernier, la comédienne Jocelyne Monier et le bruiteur Maxime Lacôme, invite les spectateurs dans un univers a priori insolite, mi-laboratoire, mi-cuisine, composé de bidons, de bouilloires, de micros, de cafetières italiennes et de moulins à café. Or, ce monde ne tarde pas à faire tout de même sens. Les sons bouclés et distordus de vapeur et d’ébullition créant le paysage sonore, Jocelyne Monier, fidèle à elle-même, use de sa bonhomie charmante et espiègle pour nous conter les conseils de jardinage de Dubuffet. Avec un naturel accablant et une bonne dose d’autodérision, elle nous livre ses sommations (« Il faut biner avec une binette ») et ses vérités sur le bois qui travaille et se gondole, tout en préparant du café pour l’offrir à un public conquis.
Hélas, les autres propositions sont loin d’être aussi réjouissantes. On ne mentionnera pas ici le concert de Fo Biné, faute de l’avoir vu — chacun des parcours faisant l’impasse sur une proposition. Toutefois, après avoir assisté à Grantauredu qué tanfaurme, on se dit que ça n’aurait pu qu’être mieux. En effet, la variation numéro trois, dansée par Patricia Rotondaro et scénographiée par Monika Goerner, apparaît assez vaine. La danseuse a recours à moult accessoires dont l’utilisation ne perce pas la couche de l’artifice, nous laissant un goût amer d’incompréhension tournant à la gêne.
Que dire sinon de la Konférans d’ouverture, seule nouvelle création du lot ? Cette adaptation de l’Avant-projet d’une conférence populaire sur l’art de Jean Dubuffet, pensée par Anne Marina Pleis du Théâtre 27 (porteuse de l’ensemble du projet Les Bottes à Nique) est loin d’être inintéressante. Les propos sensés et comiques, aimablement et simplement tenus par l’Allemande Gerda Müller, s’attachent à démystifier l’art et l’artiste, à les faire redescendre de leur piédestal. Si la forme fonctionne en tant que mise en bouche pas désagréable, elle ne nous transporte guère plus.
Pour clôturer l’événement, un karaoké dubuffesque était organisé : sur l’air de chansons populaires, le public était convié à chanter à son tour le texte sur l’art de biner. Un exercice périlleux auquel jeunes pousses et vieilles branches se sont frottées sans trop se piquer.

Barbara Chossis

 

Les petites formes du projet Les Bottes à Nique par le Théâtre 27 étaient présentées du 10 au 22/02 au 3BisF (Aix), au Théâtre Antoine Vitez (Aix) et au Théâtre du Merlan, où nous les avons vues.