Les BD de l'année 2009

Les BD de l'année 2009

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    • Vehlmann & Kerascoët – Jolies ténèbres (Dupuis)
    Rarement une bande dessinée n’aura été aussi luxuriante et cruelle à la fois, lumineuse et intensément sombre. Ici, la violence des situations ressort d’autant mieux qu’elle est véhiculée par un dessin magnifique, qui s’inscrit dans la grande tradition franco-belge. Ne pas se fier à l’apparente naïveté du trait : dans ce conte extrêmement noir, tout conduit à la lutte pour la survie individuelle et/ou collective, puis à la destruction immédiate ou à petit feu. Etonnant, somptueux : un chef-d’œuvre.

    • Harvey Pekar – American Splendor (Chez Çà et Là)
    Dessinées par la fine fleur de la BD indépendante américaine (Crumb, Gary Dumm, Gerry Shamray…), les courtes histoires de Pekar auront permis à la BD d’introduire dans son giron un genre qu’elle avait jusque-là parfaitement ignoré : l’autobiographie. Enfin édité en français, ce monument du 9e Art — et must de l’underground — est une œuvre surprenante, avec laquelle Pekar aura brisé nombre de tabous narratifs et ouvert la voie à une véritable révolution qui, encore aujourd’hui, fait des émules… Incontournable.

    • Bonet et Munuera – Le Signe de la Lune (Dargaud)
    Avec ce magnifique conte dessiné, on peut voir à quel point Munuera gâche son talent en travaillant sur les scénarios débiles de Morvan (Spirou et Fantasio) ou sur d’autres séries plus légères (Merlin). Ici, le graphisme est d’une beauté admirable : en pleine page ou en petite case, chaque trait de crayon s’admire des heures durant. Le scénario d’Enrique Bonet donne à l’auteur une liberté — et une intimité — superbe, qu’il n’avait jamais osé s’octroyer auparavant. L’une des plus belles surprises de l’année.

    • Rabaté – Le petit rien tout neuf avec un ventre jaune (Futuropolis)
    A la lecture de ce réjouissant ouvrage, on songera certainement à l’âge d’or de la comédie hollywoodienne (Capra, Lubitsch…), comme aux BD de Winsor McCay ou David Calvo. Ici, tout coule de source et, en même temps, ne cesse de surprendre. Description réaliste de la vie quotidienne et fantaisie, chronique et fable se côtoient pour forger un récit dynamique, drôle, tendre et parfois féroce. Souple, élégant, surprenant et toujours vivant, le dessin de Pascal Rabaté est magnifié par les couleurs d’Isabelle Merlet.

    • Oppel & Pinelli – Trouille (Casterman)
    Le texte est écrit dans un style concis, assez distant. Sur chaque page, les cases ne sont pas matérialisées et les scènes se juxtaposent les unes à la suite des autres. Il en découle une grande liberté de mouvement et donc une dynamique qui correspond parfaitement à la fuite au centre du récit : les dessins semblent s’être échappés des cases. Le trait de Joe G. Pinelli est vif, brut, et rend compte très justement de la trouille qui court tout au long du récit. Cette adaptation d’un roman de Marc Behm est à lire de toute urgence !