<em>Le Quadrille amoché</em> par la Cie L’Individu au Théâtre Gyptis

<em>Le Quadrille amoché</em> par la Cie L’Individu au Théâtre Gyptis

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Cadavre exquis

La compagnie L’Individu propose sous la plume de Charles-Eric Petit un Quadrille amoché aux inspirations et sources si diverses qu’il en devient, en une manière de cadavre exquis, une création hybride et intéressante.

Ils sont quatre. Quatre comédiens, dont une femme, tous trentenaires et amis de dix ans. Histoire de prendre hauteur et recul sur leurs relations et eux-mêmes, ils partent camper ensemble à la montagne. Les dix années sont résumées dans une bande-son préambule. Pour ce nouveau projet, la compagnie L’Individu a procédé par étapes, chacune se suffisant à elle-même et nourrissant la suivante. Ainsi retrouve-t-on dans les échanges conduisant à la décision de départ le travail sur le corps et la lumière, l’influence de Bacon, quelques extraits de nouvelles écrites par Jérôme Lambert, et, bien sûr, le point de départ de la création : Le Songe d’une nuit d’été de William Shakespeare. Quelques incursions de l’actualité et quelques obsessions (l’être, la métamorphose, la représentation, les monstres intimes…) des participants viennent compléter l’élaboration toujours mouvante de cet acte. Charles-Eric Petit n’est donc pas seul – et seulement – auteur, mais aussi réalisateur, maître tailleur de cet assemblage. Passées les scènes urbaines relatant la prise de décision, on se retrouve plongé dans un décor de montagnes où le vaudeville va trouver son dénouement. Un rideau, ouvert en triangle à base large, est à la fois le premier plan, l’ouverture et l’arrière-plan, le sommet en toile de fond sur lequel apparaissent tantôt la lune, tantôt le disque rouge du soleil des aurores. Sur un plan intermédiaire, un autre rideau agit comme un filtre photographique, l’ensemble donnant avec les jeux de lumière une belle impression de profondeur. Tout est ainsi sur plusieurs plans, chargé de références parfois plus confusément devinées que clairement entendues. L’écriture elle-même joue sur plusieurs registres, parfois d’une musicalité très classique, parfois tout à fait courante. Enfin, l’ensemble n’est pas porté par une urgence ou un sentiment, ni par une mécanique inéluctable dont on pressentirait l’impérieuse emprise. Il est porté par le talent de tous à jouer, mettre en scène, éclairer. Comme si l’on avait voulu tenter l’expérience de mettre tous les ingrédients habituellement au service d’une création pour voir celle qui en résulterait…

Texte : Frédéric Marty
Photo : Jeanne Marty

Le Quadrille amoché par la Cie L’Individu était présenté du 8 au 12/05 au Théâtre Gyptis.
Rens. www.cielindividu.com