Le Mythe du retour à la Bastide du Château de Servières

 Passé recomposé

 

Retour dans les quartiers Nord pour le Château de Servières qui, en marge de sa programmation habituelle aux Ateliers d’artistes du boulevard Boisson, retrouve la Bastide des Castors pour une année 2013 exceptionnelle. A ses côtés, vingt-deux artistes empruntent (enfin), à l’instar d’Ulysse, le chemin du retour dans cette bâtisse du XVIIIe siècle, d’où la vue sur Marseille demeure imprenable.

 

Il fallait bien une année Capitale pour que l’association du Château de Servières, avec l’aide du FRAC et du projet Ulysses, retrouve sa bastide d’origine. Celle du temps où — fait unique — la galerie appartenait à un centre social, qui plus est dans les quartiers Nord, démontrant la volonté de l’association de démocratiser l’art contemporain. Notons que les trois expositions qui se dérouleront cette année dans la bastide demeurent l’une des rares offres culturelles que Marseille (Provence 2013) propose aux habitants du quinzième arrondissement.
Le retour à Servières se substitue donc ici au retour à Ithaque du héros d’Homère, superbement illustré par la sculpture de Sylvain Ciavaldini et Antonio Gagliardi, puisque les vingt-deux artistes invités par Martine Robin ont tous fait l’expérience de ce projet utopique à un moment ou un autre. Une belle histoire que retrace le film d’Hervé Nahon.
Beaucoup d’artistes, parmi lesquels Raphaëlle Paupert-Borne, Caroline Duchatelet, Suzanne Hetzel, Sophie Menuet et Pascal Martinez, ont donc choisi leur premier passage à la Bastide comme point de départ de réflexion. Ou encore Laurent le Forban et Nicolas Gilly, qui réitèrent ici l’expérience d’une œuvre à quatre mains, lumineuse et enjouée. Des histoires personnelles de nombreux artistes sont liées à celles du Château, comme en témoignent le film d’animation de Dominique Castell réalisé à partir d’une série de photos montrées en 2004, ou les peintures de Katia Bourdarel, dont les deux enfants prenaient la pose il y a presque dix ans… Le retour et, par extrapolation, le temps qui passe, s’insinue dans chaque œuvre. Les artistes interprètent le thème symboliquement et formellement, comme Pascal Navarro, dont les volants de badminton sont retrouvés figés quelques années (ou quelques siècles) après une partie, ou Hervé Nahon, qui fixe les mots de Nietzsche dans une matière s’immobilisant lentement. Les départs et les retours se matérialisent poétiquement dans les deux valises au sol de Marc Quer, tandis que d’autres jouent avec des notions de déplacements physiques ou intellectuels plus larges comme Koki Watanabé, Alain Brunet, Gerlinde Frommherz, Emmanuelle Bentz, Marijo Foehrlé, Raoul Hébreard, Antje Poppinga…
Et puisque le Château de Servières assume une double actualité, rappelons qu’il ne reste que quelques jours pour aller voir la très belle exposition Entre chien et loup, réunissant Karim Ghelloussi, Bill Culbert, Arham Lee et Jérémie Delhome au boulevard Boisson.

Céline Ghisleri

Le Mythe du retour (dans le cadre du projet Ulysses conçu par le FRAC PACA / MP 2013) : jusqu’au 29/06 au Château de Servières, la Bastide (Place des compagnons Bâtisseurs, 15e).

Entre chien et loup : jusqu’au 23/02 à la Galerie du Château de Servières (11-19 boulevard Boisson, 4e)

Rens. 04 91 85 42 78 / www.chateaudeservieres.org