Vers un protocole de conversation de Georges Appaix © Pascale Hugonet

Retour sur le festival Dansem #17

Le geste au corps

 

Le festival Dansem a clôturé sa dix-septième édition sur le très remarqué Vers un protocole de conversation de Georges Appaix. L’occasion de faire le point sur le devenir de la danse contemporaine en Méditerranée.

 

Ce qui point dans les désirs de la programmation de Cristiano Carpanini, c’est la nécessité d’interroger la fonction du geste. Du solo à la danse groupée, la diversité des propositions anime un répertoire des formes où le silence et l’immobilité alternent avec le foisonnement. On se penche d’abord sur le travail de Danya Hammoud (Egypte). Deux femmes interpellent la présence d’un homme. Les gestes frôlent l’immobilité et emmène le corps dans un espace dénudé pour nous interroger sur la prise de pouvoir et la question du dominant/dominé. On pense inévitablement à la position de la femme dans un pays en proie au fondamentalisme, mais il serait réducteur de voir la danse par ce seul prisme. Ce qui point, c’est avant tout la question du possible dans l’expression du corps. On retrouve cette question dans le travail de Radhouane El Meddeb (Tunisie), où quatre hommes se déhanchent jusqu’à emprunter le corps et les geste de la femme dans un travestissement qui annule le sexe et replace l’humain au cœur de son essence : la question de l’être. Maintenant, arrêtons-nous sur la formidable performance d’Alessandro Bernardeschi dans la création de Georges Appaix. Un homme converse sur les pas d’une femme, il lui intime des ordres, puis la câline, puis la renie, il se surprend lui-même dans ses contradictions. Il avance dans une forme d’errance et une suite de propositions qui formule le début d’un langage, d’une histoire, quelque chose qui questionne l’être dans sa quintessence, et d’un seul coup la danse rejoue l’histoire de la danse. On pense à Docteur Mabuse de Jean Claude Galotta, à Necessito de Dominique Bagouet… Georges Appaix, qui nous avait habitués à des choses plus policées, se lâche en donnant les pleins pouvoirs à un seul être, ça passe ou ça casse, et là ça fait très mal tellement c’est beau.

Karim Grandi-Baupain

 

Le festival Dansem a eu lieu du 6/11 au 16/12.
Rens. : www.dansem.org